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énormes : ses prévisions furent trompées, elle ne rapporta que 500,000 liv. sterl. Aussi a-t-il été obligé l’année dernière de rétablir l’impôt sur le revenu, non cependant sans l’avoir remanié dans plusieurs de ses dispositions.

Le budget de l’empire, qui montait en 1860 à 37,706,209 liv, sterl., s’élève maintenant à près de 49 millions de liv. sterl. Sans doute le gouvernement anglo-indien peut se féliciter de l’état actuel de ses finances et de l’équilibre qui y règne ; mais cette satisfaction serait bien plus légitime, si, au lieu de parcourir la nombreuse série des travaux et des produits de l’activité humaine pour y trouver matière à contributions, il mettait un terme aux dépenses extravagantes dont plusieurs branches de son administration se rendent coupables. Le ministère des travaux publics pourrait diminuer son budget d’un quart sans arrêter un seul des travaux qu’il fait exécuter. Des marchés scandaleux se signent à Calcutta en parfaite sécurité de conscience. L’on connaît les traitemens fabuleux et sans analogues dans aucun pays du monde que les officiers, les magistrats et les employés supérieurs s’adjugent, et cela dans des contrées où la journée du laboureur vaut 30 centimes. Ils se justifient en alléguant que l’on ne peut se faire respecter de cette race qu’en menant un grand train, et de plus que les avantages doivent être proportionnés aux dangers que l’on court en restant sous ce climat meurtrier. Excellentes raisons, si les Hindous avaient appelé librement les Anglais et leur avaient confié la direction de leurs affaires ! C’eût été alors de la partie ces derniers un sacrifice pour lequel ils auraient été en droit d’exiger une généreuse rémunération,


IV

L’histoire des dix dernières années de l’empire indo-britannique ne présente aucune de ces grandes opérations militaires qui font époque et trouvent leur place dans les annales d’un pays. La péninsule hindoustane a été comparativement tranquille, et aucune conquête n’est venue reculer les bornes de la domination anglaise. Nous ne voulons pas dire cependant que cet empire ait été complètement exempt de tout conflit, et que son armée ne soit pas sortie, en partie du moins, de ses cantonnemens. Non-seulement la métropole s’en est servie dans les deux guerres qu’elle a eu à soutenir, l’une en Chine et l’autre en Abyssinie, mais il est impossible qu’un pays aussi étendu, et qui a pour voisins des peuples le plus souvent étrangers aux droits des gens, n’ait pas maille à partir tantôt avec une tribu à l’ouest, tantôt avec une peuplade au nord ou à l’est. Il est rare que l’on ne retrouve pas à l’origine de la plupart