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éloigné du mouvement de condensation ; auquel il n’a pas peut-être entièrement cessé d’obéir.

Un soleil égal en diamètre à l’orbite de la planète Mercure serait énorme vu de la terre. Il apparaîtrait sous un angle de plus de 40 degrés ; il remplirait à lui seul le quart de l’horizon et donnerait lieu à des crépuscules si lumineux et si prolongés que la niait en serait annulée. A plus forte raison, il en serait ! de même de l’effet des latitudes ; la zone torride, transportée sous nos climats, déborderait bien au-delà des cercles polaires. Avec un soleil n’occupant que la moitié seulement du même orbite, les mêmes effets se produiraient encore, et L’illumination des ; crépuscules compenserait, surtout au sein d’une atmosphère plus étendue, la diminution du diamètre apparent, qui excéderait encore de plus ; de quarante foie la dimension actuelle. Un semblable soleil brillerait d’une lumière plus calme et répandrait une chaleur moins vive, mais plus égale, justement parce que le foyer, en serait moins concentré ; il retiendrait encore quelques-uns des caractères de la nébuleuse primitive ; il prolongerait le jour par l’amplitude de la réfraction, et reculerait les bornes de la zone tropicale en projetant défrayons verticaux jusque dans nos régions. Sans doute cette hypothèse est loin de tout résoudre, mais elle s’adapte si naturellement aux phénomènes du monde primitif, elle fait si bien comprendre ses lois climatériques, ses jours à demi voilés, ses nuits transparentes, la tiède température de ses contrées polaires, l’extension originaire, puis le retrait de la zone torride, réduite enfin aux limites actuelles, que l’on est fortement tenté d’y croire tout en se répétant à voix basse : Serait-ce donc là l’unique cause d’une réunion si complexe de phénomènes ?

En réalité, ces recherches ; touchent encore à leur début, et déjà l’esprit de l’homme voudrait tout saisir, tout parcourir, tout deviner, nil mortalibus arduum. Il ne s’avoue pas assez que sa nature est bornée, successive, que les élans subits, qui réussissent parfois à certains génies, sont plutôt pour le commun des hommes le signe d’une impatience nerveuse et maladive qui altère la sûreté du jugement, trouble l’analyse, et empêche de prendre la voie de la déduction patiente et graduelle. Cette voie est cependant la seule qui ne trompe jamais. Elle mènera quelque jour à travers des détours imprévus, a la connaissance directe de bien des questions, aujourd’hui à l’état de problèmes scientifiques. Celle des anciens climats est une des plus curieuses, mais une de celles aussi qui exigent le plus d’attention et de persévérance pour être à la fin comprises et résolues. Avant tout, et c’est ce qui lui a manqué jusqu’ici, il faut qu’elle obtienne le concours de plusieurs sciences combinées, réunissant leurs efforts et les faisant converger vers le même objet.


GASTON DE SAPORTA.