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troduit avec l’eau de la mer, qui contient suspendue une quantité considérable de débris animaux en dissolution, et par conséquent doit dégager, sous l’action du feu qui la vaporise, tout ce qu’elle comporte d’azote.

Comment l’eau de mer peut-elle pénétrer dans le foyer des volcans ? Par les fissures dont il était question dans la première partie de ce travail. Ces fissures se prolongent sous la mer et se rouvrent par l’effet du tremblement de terre ou de certaines révolutions souterraines. Pendant l’éruption de 1861, le golfe de Naples fut empesté d’acide carbonique qui sortait du fond de la mer, la faisait bouillonner et tuait les poissons, rejetés bientôt sur la plage. Pour que l’acide carbonique se dégageât du fond de la mer, il fallait nécessairement qu’il y eût des fissures par où l’eau pénétrait et expulsait le gaz. Les navigateurs qui visitent les îles Lipari ont signalé, entre Lissa Bianca et Bottaro, un point où le fond de la mer semble en ébullition ; lorsque la surface de l’eau est tranquille, on voit des bulles de gaz se dégager en grande abondance par des orifices inconnus ; par où le gaz sort, l’eau entre.

Si les volcans sont éloignés de la mer, alors c’est l’eau douce, soit l’eau des pluies, soit l’eau des sources, qui pénètre par infiltration à travers des roches poreuses. Pendant des années et parfois des siècles, il se forme ainsi de vastes réservoirs dans l’intérieur de la terre. Le jour où par suite d’un éboulement, d’une obstruction de conduits, d’un tremblement de terre, de l’action du feu qui met les roches en fusion, ces nappes d’eau douce ou d’eau salée sont en contact avec le foyer du volcan, aussitôt se produit le phénomène qui accompagne l’explosion d’une chaudière à vapeur. L’eau se vaporise à cette chaleur qui dépasse toutes les mesures de chaleur connues ; la violence indicible de la pression provoque l’éruption, et jette dans les airs des torrens de vapeur qui se refroidissent aussitôt et retombent en pluie. Pour concevoir comment Herculanum a été noyé sous une épaisseur de cendres et de boues qui dépasse 80 pieds, il faut se souvenir que dans toute grande éruption l’eau a une part considérable, et que sa force est supérieure peut-être à celle du feu.

Ces préliminaires établis, rappelons avec ordre quels sont les phénomènes qui accompagnent une grande éruption, car la connaissance de ces phénomènes nous est nécessaire pour comprendre le récit des auteurs anciens : elle leur prête la lumière qui leur manquait à eux-mêmes. Ce sont :

1o La colonne de fumée, indice précurseur ; elle s’élève jusqu’à 2 000 et 3 000 mètres dans les airs, et remplace le petit nuage blanchâtre qui sort d’ordinaire du cratère pour être aussitôt courbé par le vent.

2o Les tremblemens de terre qui précèdent et accompagnent l’é-