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sollicitude (sauf en toute chose l’autorité du saint-siège); elle sera composée de cinq facultés, dont la première en dignité est celle de la théologie, la seconde celle du droit, la troisième celle de la médecine, la quatrième celle de la philosophie, la cinquième celle des sciences mathématiques et physiques. » En finissant, les évêques mettaient leur entreprise sous la protection d’une puissance qui n’abandonne jamais, disent-ils, ceux qui l’invoquent. Ce n’est point de Dieu qu’il s’agit, car son nom n’est point prononcé. « Afin que tout ce qui est réglé et doit l’être à l’avenir ait toujours un résultat favorable, nous élevons les yeux et les mains vers la très sainte Vierge, dont le nom est rempli de bénédictions et de faveurs divines, et à laquelle nous recommandons humblement notre académie comme à une maîtresse et patronne très puissante. » Il faut dire que l’institution était savamment ordonnée d’après le principe d’une autorité absolue. Grâce à « la fidélité et à l’obéissance jurées, et aux professions de foi suivant la formule du pape Pie IV, » il n’est pas à craindre que jamais nouveauté profane y vienne effleurer la science orthodoxe, ou qu’un nouveau Galilée y apporte le scandale de ses découvertes. Quand on établira une université catholique en France, l’acte de fondation sera probablement conçu en d’autres termes, et ce seront des laïques qui le signeront.

Il ne suffisait pas de créer l’université, il fallait la faire vivre, se procurer des locaux, rétribuer les professeurs. Pour une entreprise laïque, c’eût été une grave difficulté; pour les évêques, ce n’en était pas une. Dans un pays où la religion a conservé son empire, les ministres du culte ont à leur disposition des trésors inépuisables. Ils n’ont qu’à frapper le rocher, et la source coule. Qui a la foi est prompt aux bonnes œuvres, donne volontiers et donne largement. La foi est un levier très puissant et très respectable ; ceux qui en disposent peuvent beaucoup, pour le bien comme pour le mal. En février 1834, les évêques s’étaient déjà adressés au clergé et aux fidèles de leurs diocèses, sollicitant a messieurs les curés desservans » de faire contribuer par tous les efforts leurs ouailles à l’érection d’une université catholique, a Nous prions, disaient-ils, tout le respectable clergé de nos diocèses, sans exception, de donner l’exemple d’une généreuse coopération à une si belle œuvre, et, sans vouloir imposer d’obligation à personne ni mettre des bornes à la libéralité de nos chers collaborateurs, nous engageons messieurs les vicaires-généraux, chanoines, doyens et curés de première et seconde classe à prendre vingt actions, messieurs les desservans dix actions, etc. » Il paraît que certains ecclésiastiques ne comprirent point d’abord toute l’utilité de l’œuvre à laquelle ils étaient appelés à participer, car dans son mandement du 5 janvier 1836 l’évêque de Liège se vit forcé de blâmer sévèrement « la détestable indifférence