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perception des droits d’entrepôt. La ville était intéressée dans les bénéfices de cette régie pour les deux cinquièmes, et comme les produits de la régie devaient compenser et au-delà le montant des annuités dues à la compagnie, le préfet ne trouvait pas qu’il y eût à faire mention de cet article au budget, soit comme recettes, soit comme dépenses ; il se bornait à le mentionner dans une simple note au bas d’une page de son dernier rapport. Ainsi la ville, n’étant pas prête à substituer au 1er janvier 1870 l’entrepôt réel à l’entrepôt fictif, a loué des locaux provisoires où les propriétaires et les commerçans seront tenus de déposer leurs vins, s’ils veulent éviter de payer les droits d’octroi avant la vente réelle des liquides, et de faire ainsi une avance que M. Jules Simon, devant le corps législatif, a évaluée à 18 millions de francs. Ces locations forcées constituent une première dépense ; de plus, pour préparer la construction de l’entrepôt réel, la ville a acheté beaucoup de propriétés privées. M. Simon en évaluait le total déjà réalisé au 22 décembre dernier à 13 millions. Il faudra en acheter encore, et enfin bâtir l’entrepôt lui-même, ce qui coûtera cher, surtout si l’on veut se donner le luxe d’un monument de plus. Certes on doit blâmer l’administration de la ville d’avoir tant retardé l’exécution d’une loi formelle, au risque de troubler dans ses intérêts la plus grande industrie de la France, contrainte à déménager brusquement 2 millions d’hectolitres de vin ; mais il faut de plus reconnaître que dans cette circonstance, comme dans les précédentes, une dépense considérable a été engagée et un emprunt contracté sans autorisation. On a remédié comme on a pu au manque provisoire d’entrepôt réel et pourvu aux besoins du commerce ; on propose aujourd’hui de régulariser la dépense et l’emprunt par l’adjudication de l’entreprise. Une loi a été présentée qui annule le traité de 1869, et, « attendu que la ville ne peut prélever sur ses budgets, dans l’espace de deux ou trois ans, la somme considérable qu’exige la création des entrepôts, autorise le préfet à concéder, par voie d’enchères et de concurrence, la construction d’un entrepôt dont le prix pourra s’élever à 40 millions. » Le concessionnaire sera remboursé en soixante annuités, couvertes avant tout par le produit des droits de magasinage, dont il partagera ensuite les bénéfices avec la ville. Il n’est pas douteux que ces droits suffiraient à couvrir les dépenses ; la charge de la ville ne serait de ce chef que nominale. Il importait toutefois de ne pas omettre cette dépense extraordinaire dans le bilan de l’exercice 1869.

Ces comptes, hâtons-nous de le dire, ne sont que ceux de M. Haussmann, tels que les relate le mémoire du 28 novembre dernier. Ré ont étonné d’abord, et bientôt ils ont inspiré de nouvelles craintes. Tout avait-il été confessé ? Si explicites que fussent les aveux, ils n’ont pas suffi pour calmer les appréhensions, et la suite a bien fait