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l’oncle de Napoléon, d’exercer sur l’empereur l’influence qu’on aurait aisément sur un homme incertain et flottant sur les partis qu’il prend, et l’on peut avancer sans crainte de se tromper que la charité de l’église doit être encore plus grande que l’orgueil d’un conquérant, que c’est à elle de prévenir les plus grands malheurs en se prêtant à un prompt arrangement. L’empereur n’hésitera jamais à repousser les attaques dirigées contre lui, et, loin de reculer, il ira toujours en avant… » C’était sans doute pour donner lui-même un exemple frappant de la complaisance qu’il était nécessaire de témoigner toujours à son redoutable neveu que dans sa lettre au pape le cardinal tenait, à propos des bulles épiscopales, des libertés gallicanes et des quatre articles, un langage passablement différent de celui qu’il avait coutume de faire entendre aux ecclésiastiques de son entourage et à ses habitués du faubourg Saint-Germain. Chose plus étrange, encore, afin d’amortir auprès du pape, si le bruit en était venu jusqu’à lui, reflet de la séance solennelle tenue naguère aux Tuileries, le cardinal Fesd ne craignait pas d’invoquer le soi-disant suffrage de l’ancien directeur de Saint-Sulpice. « Qu’il me soit permis, très saint père, disait-il, les détournant assez effrontément de leur véritable sens, qu’il me soit permis de citer les paroles prononcées par le vénérable M. Émery, qui nous a été enlevé, il y a peu de jours, par la mort, à savoir que les circonstances actuelles prouvent évidemment que les quatre articles sont le palladium de l’église romaine. Ce n’est pas, continuait l’oncle de l’empereur, que je prétende que votre sainteté doive les approuver ; mais quel mal pourrait-il résulter pour le saint-siège de la promesse faite de ne pas agir contre ces articles ? »

A coup sûr, s’il eût encore été vivant, l’ancien directeur spirituel du cardinal Fesch aurait frémi d’indignation en apprenant qu’on ne se faisait pas scrupule de se servir de son nom pour réclamer des concessions contraires à la conscience de Pie VII, et que, dans le sein du comité, ecclésiastique, il avait déclarées ne pouvoir être décemment demandées à un pape persécuté et captif. Il n’eût pas été moins profondément affligé du langage tenu au prisonnier de Savone par les dix-neuf évêques réunis chez le cardinal Fesch. Leur lettre, plus directement inspirée par l’empereur que celle de son grand-aumônier, contenait en effet sous une forme polie, mais à peine déguisée, des menaces éventuelles de rupture, rupture à laquelle le cardinal Fesch n’avait jamais voulu consentir à faire lui-même la moindre allusion.

« Telle était la grandeur du mal, ne craignaient point de dire ces prélats, que, si la réponse de sa sainteté ne leur parvenait point, ils se verraient contraints, par ce seul fait et par la force des choses, d’accorder momentanément ces dispenses… Nous ne chercherons