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lui-même, mais encore celui de la-saumure qu’il s’agit d’y ajouter. L’ouvrier introduit ensuite près du manche du jambon la pointe creuse du tube effilé, puis il ouvre le robinet La saumure du réservoir supérieur, chassée dans le tissu cellulaire par la pression que le liquide de ce réservoir exerce sur l’orifice d’écoulement, pression qui est celle d’une colonne d’eau d’environ cinq mètres de hauteur, s’insinue entre les muscles et gonfle sensiblement toute la masse charnue en même temps qu’elle en augmente le poids. Au moment précis où le jambon a reçu la quantité normale de saumure qu’il faut lui donner d’après le poids qu’il présente, la balance trébuche, et l’ouvrier ferme le robinet. Comme les jambons pesés sont disposés à la file sur la table, l’opération marche d’une manière continue avec une grande rapidité. La salaison se trouve ainsi effectuée très régulièrement à l’intérieur, et, pour assurer l’effet de la dissolution salée sur les parties superficielles, on tient pendant quelques jours les jambons immergés dans une cuve contenant une saumure préparée de la même façon. De là on les transporte au fumoir, où ils sont soumis à un enfumage perfectionné. C’est une vaste pièce dans laquelle vient s’ouvrir la cheminée de deux foyers situés à l’étage inférieur. La fumée développée par la combustion incomplète du bois dans ces foyers se répand dans cette pièce en même temps que l’air échauffé. On dessèche donc partiellement et on fume les jambons du même coup. Des thermomètres disposés à divers points de la chambre et visibles de l’extérieur permettent de régler la température selon le degré de siccité que l’on veut obtenir. Le seul bois employé est du bois de chêne très sec. On a ainsi des composés pyroligneux toujours identiques. Le poids du bois à brûler a été également déterminé avec précision, et la quantité de fumée s’en déduit, car la quantité d’air introduite dans le foyer est toujours proportionnelle au poids du bois, la section des ouvertures d’entrée de l’air étant réglée pour cela, et par conséquent la combustion ménagée du chêne sec s’opère invariablement dans les mêmes conditions.

Ce que l’auteur s’est surtout proposé dans ces dispositions diverses, c’est, comme on a pu le remarquer, d’obtenir des résultats constans et de ne rien abandonner au hasard. Le succès a justifié ses espérances. Les produits alimentaires préparés dans l’usine qu’il a fondée ont été dès l’abord appréciés des consommateurs. Beaucoup d’agriculteurs et de commerçans qui auparavant soumettaient eux-mêmes à une salaison plus ou moins imparfaite le produit de l’abatage de leurs porcs ont même pris l’habitude de s’adresser à la nouvelle usine. S’ils ont ainsi à subir des frais de transport plus considérables, en revanche ils sont sûrs d’avoir des jambons doués