Page:Revue des Deux Mondes - 1867 - tome 68.djvu/876

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

d’Australie, telles que des eucalyptus, des acacias, etc. ; mais les indigènes mettent peu d’empressement à seconder le gouvernement parce qu’ils craignent que ces plantations ne diminuent l’étendue des terres cultivables et ne deviennent préjudiciables à leurs enfans : ils disent que leurs ancêtres n’ont jamais planté de teck, et qu’ils s’exposeraient en faisant autrement qu’eux à s’attirer la colère céleste.

Outre les plantations faites pour repeupler les vides des forêts, il faut mentionner celles qui ont pour objet d’ombrager les routes et les canaux. Ces dernières sont exécutées par les soins des ingénieurs de district, et sont aussi nécessaires aux voyageurs qu’au bon entretien de la route, comme on peut s’en convaincre par les belles avenues de vateria indica, d’artocarpus integrifolia, de lagerstroemia regina au Malabar, de sals à Gumsur, de tamarins et de banyans (ficus indica) à Salem et à Mysore. Ce sont ces deux dernières essences qui, plantées alternativement, conviennent le mieux à la création de ces avenues. Comme les banyans croissent très vite et donnent beaucoup d’ombre, ils forment l’avenue en attendant que les tamarins aient acquis des dimensions suffisantes. Quand la route est assez large, il convient de mettre une double rangée d’arbres de chaque côté de façon à avoir des chemins ombragés pour les piétons. Ces plantations exigent beaucoup de soins et doivent être arrosées pendant les premières années ; aussi, pour décider les ryots à les entreprendre, leur fait-on des concessions de terres et des remises d’impôts.

Les plantations de haies autour des propriétés cultivées ne sont pas moins importantes que celles des avenues, car on peut dire sans exagération que le défaut de clôture est le plus grand obstacle aux progrès agricoles dans l’Inde. On ne saurait en effet s’imaginer les dégâts que commettent dans les cultures non-seulement les animaux sauvages, mais aussi les bestiaux. Le plus souvent ceux-ci appartiennent à des gens des castes supérieures, auxquels les ryots n’osent adresser aucune réclamation directe, mais dont ils se vengent en commettant des vols à leur préjudice ; il en résulte un double dommage pour la société. Plus nuisibles encore que les bestiaux sont les buffles sacrés, qui, étant la propriété des temples, vont où ils veulent chercher leur pâture, sans gardiens ni conducteurs ; jusqu’à ce qu’ils aient atteint l’âge du sacrifice. Il en est de même des vaches, qui sont des animaux sacrés contre lesquels on ne peut jamais employer la violence. Des haies bien touffues mettent les cultures à l’abri, ainsi qu’on peut s’en convaincre partout où les Européens se sont établis. Les meilleurs arbustes à employer sont l’inga dulcis, qui est un grand et bel arbre dont les branches