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tient une spore. Celle-ci perce la membrane qui l’enveloppe, s’allonge comme la tigelle d’une plante phanérogame, s’articule tout en s’allongeant, et finit par former un nouveau filament aux deux extrémités duquel recommence le même étrange phénomène.

S’il fallait choisir dans ce monde des algues, où abondent les curiosités de toute sorte, on serait tenté de déclarer remarquable entre toutes la tribu des confervacées. Là se multiplient à tel point les confusions entre les règnes, qu’après avoir comparé les classifications les plus patiemment étudiées, l’on s’aperçoit que beaucoup d’entre elles sont arbitraires, que l’accord est impossible, et qu’en définitive il reste une foule d’individus et même de sections importantes dont la place exacte est absolument incertaine. Une ancienne division, entre autres celle des arthrodiées, a été considérée comme formant décidément passage entre les plantes et les animaux. Les arthrodiées en effet (du grec arthron, articulation) comprennent des êtres filamenteux essentiellement articulés, dont les tubes sont remplis de granulations colorées. Parmi les différens groupes se distinguent les oscillaires citées plus haut, et les conjuguées ou zoocarpées. Toutes ces créatures bizarres sont douées de mouvemens, elles nagent, elles rampent, et beaucoup d’entre elles paraissent être de véritables animaux, ou tout au moins, — chose bien plus extraordinaire encore, — semblent osciller entre deux manières d’être et passer alternativement de l’animalité à un état purement végétatif ; mais ce que ces végétaux offrent de véritablement insolite, c’est le mode de fécondation qui les caractérise. A certaines époques, on voit les conjuguées rapprocher leurs filamens et les unir au moyen d’appendices latéraux, qui, par une sorte d’accouplement, se soudent bout à bout, et forment un canal à travers lequel les granulations de l’un des filamens se mêlent aux globules de l’autre. De ce mélange naît une spore, et cette spore forme une plante qui, par suite de son développement normal, parcourra de nouveau les phases de cette étrange vie alternante dont on ne saurait limiter les contours ni graduer les métamorphoses.

Montons dans la série ; nous y trouverons les mêmes phénomènes dans leur généralité, mais rendus complexes et pour ainsi dire ingénieusement nuancés. Voici les fucacées, les algues les plus abondantes et les plus vulgaires, surtout si nous choisissons parmi elles le fucus vésiculeux, dont nos côtes sont couvertes aussi bien dans le nord et l’ouest que le long des plages de la Méditerranée. Ses tiges ou plutôt ses frondes sont plates, bifurquées, çà et là gonflées par des vésicules ovales remplies d’air, probablement destinées à les soutenir à la surface des eaux ; aussi faut-il bien se garder de confondre ces curieux appareils natatoires avec d’autres