les agitations révolutionnaires d’une part, et de l’autre par l’émigration. Les corps privilégiés, le régiment des gardes-françaises à Paris, celui du roi à Nancy, avaient donné un exemple qui eut beaucoup d’imitateurs. La constituante avait l’intention de maintenir la discipline; mais, dans le feu de la lutte, les actes de cette illustre .assemblée ne pouvaient pas toujours être d’accord avec ses principes : elle fut impuissante à rétablir l’ordre. Elle proclama que tous les grades seraient ouverts à tous les Français, mais ne prit pas de mesures effectives pour la réorganisation des cadres. Elle agita la question du recrutement; mais, dans son respect pour la liberté individuelle, elle n’osa imposer aux citoyens l’obligation du service, et conserva le recrutement à prix d’argent[1]. Absorbés par d’autres soins, plaçant leur confiance dans l’institution récente des gardes nationales, les députés n’accordaient qu’une attention distraite aux affaires militaires. Cependant la guerre suivînt : il fallut bien reconnaître l’insuffisance de l’armée et du mode de recrutement. L’assemblée fit appel à la nation, qui répondit avec un admirable élan par le départ des volontaires.
Au commencement de la guerre de la révolution, les forces de la France formaient :
- 105 régimens d’infanterie de ligne de 2 bataillons chacun,
- 14 bataillons de chasseurs,
- 200 — de volontaires,
- 14 — d’artillerie, auxquels il faut ajouter quelques compagnies d’artillerie légère,
- 24 régimens de cavalerie (grosse cavalerie),
- 18 — de dragons,
- 12 — de chasseurs à cheval,
- 6 — de hussards.
C’étaient beaucoup de cadres pour peu d’hommes; l’artillerie, particulièrement trop peu nombreuse, mais excellente, avait conservé son corps d’officiers presque intact. Les troupes de ligne étaient, nous l’avons dit, rompues aux manœuvres; elles étaient en grande partie commandées par les anciens sous-officiers. Les volontaires, recrutés dans toutes les classes de la nation, formaient une véritable élite. Leurs chefs, désignés par l’élection, donnaient des espérances pour l’avenir, quelques-uns avaient servi, beaucoup étaient des hommes d’action et de mérite; mais pour le moment l’instruction, les habitudes militaires manquaient également aux
- ↑ Entre autres argumens, les adversaires du recrutement obligatoire faisaient remarquer que l’aptitude au métier des armes était loin d’être uniformément répandue parmi les populations de la France; on comptait en effet dans les quinze généralités du nord 1 soldat sur 149 habitans, et 1 seulement sur 279 dans les seize généralités du midi.