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appartient tout entière à Leblanc ; 2° Dizé n’a fait.de recherches en commun avec Leblanc que pour mieux déterminer les proportions des matières à employer, et pour établir la fabrique de Saint-Denis ; si donc, comme le désire la famille Leblanc, il s’agit de rendre un juste hommage à l’auteur de la découverte de la soude factice, c’est à la mémoire de Leblanc qu’il est dû, c’est à sa famille que le témoignage doit en être adressé ; 3° s’il s’agissait en outre d’indemnités à accorder en raison des pertes éprouvées par suite du séquestre mis sur la fabrique de Saint-Denis, ou de la divulgation du brevet de Leblanc et de son annulation, sauf avis d’une autorité plus compétente, la section penserait que ces indemnités doivent être partagées entre les divers associés, aux termes de l’acte d’association du 27 janvier 1791. » Ce solennel hommage rendu par le premier de nos corps savans à la mémoire de l’inventeur ne sera pas le dernier sans doute que la France décernera à Leblanc. Pour nous servir des termes de la pétition sur laquelle l’Académie avait à statuer, — termes qui sont rigoureusement exacts, mérite rare dans une pétition, — Leblanc est en effet « l’auteur d’une industrie qui a donné l’essor à toutes les applications de la chimie aux arts. »

Il ne faudrait pas croire cependant que la ruine, de l’usine de Saint-Denis eût paralysé la production de la soude artificielle et empêché le procédé de Leblanc de rendre au pays, dans les circonstances difficiles où celui-ci se trouvait engagé, les services qu’on en attendait. L’impulsion donnée à cette industrie par l’initiative du comité de salut public survécut à la liquidation de la société. Les besoins étaient les mêmes, les débouchés assurés pour le fabricant ; la production de la soude prit un accroissement rapide. Tandis que certaines fabriques de produits chimiques adoptaient un des nombreux procédés présentés à la commission du comité de salut public, d’autres, mieux inspirées, profitant de ce que Leblanc n’avait pu empêcher son brevet de tomber dans le domaine public, adoptaient complètement la méthode qu’il avait indiquée. Elles appliquaient ainsi, dès le premier moment le conseil donné par la commission, qui avait recommandé ce procédé aux manufacturiers comme le plus industriel et le plus économique. Elles eurent lieu de s’en applaudir, et toutes les usines qui n’avaient pas suivi cet exemple finirent par s’y ranger successivement. Parmi les manufacturiers qui cherchèrent d’abord le succès en dehors de la découverte de Leblanc, citons Alban, directeur de la manufacture de Javelle. La manufacture de Javelle fournissait aux blanchisseries de grandes quantités d’acide chlorhydrique. Le résidu de cette fabrication était du sulfate de soude. Pour extraire la