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continent, on peut ainsi la suivre pas à pas. Le 18 novembre 1864, une tempête venant de l’Atlantique est signalée par la station de Holyhead sur la côte occidentale de l’Angleterre ; là le baromètre était à 729 millimètres c’est-à-dire plus bas que sur aucun point de l’Europe ; c’est ce qu’on appelle un centre de dépression barométrique. En rayonnant à partir de ce point, la hauteur du baromètre croît successivement ; ainsi le mercure était à 735 millimètres dans le nord de l’Ecosse et dans le centre de l’Angleterre, à 740 millimètres dans le sud de cette île et sur les côtes occidentales de l’Irlande, à 745 millimètres dans le midi de l’Irlande, à Douvres et sur les côtes de Hollande, à 750 millimètres sur les côtes occidentales de la France, enfin à 755 millimètres dans le centre de ce pays et en Allemagne. A Bayonne, le baromètre avait au bord de la mer sa hauteur moyenne, qui est de 760 millimètres, et à Madrid il était à 5 millimètres au-dessus de cette moyenne. Si donc, sur cette carte muette de l’Europe, on fait passer des lignes par tous les points où la hauteur du baromètre est la même, on verra dessinés sur le papier pour le 18 novembre 186Zt quatre cercles concentriques dont le centre commun sera au nord-ouest de l’Angleterre vers la ville de Lancastre, et chacun de ces cercles correspondra aux pressions de 730, 735, 740 et 745 millimètres. En France, en Espagne, en Allemagne, en Danemark et en Norvège, le baromètre avait partout une hauteur supérieure à 745 millimètres, inférieure à 765, mais d’autant plus rapprochée de ce maximum que la station était plus éloignée de la côte nord-ouest de l’Angleterre par laquelle le mauvais temps avait abordé l’Europe.

Si maintenant on examine quelle était la direction des vents aux diverses stations le matin du 18 novembre, on trouve qu’ils convergeaient en général vers le centre de dépression barométrique et soufflaient avec plus de force dans les régions voisines du centre, surtout dans l’aire comprise entre le nord-ouest et le sud-ouest. Tel était l’état de l’atmosphère dans la matinée du 18 novembre 1864. Le lendemain 49, la tempête et le centre de dépression qui l’accompagne se trouvaient au nord-est des Shetlands, le 20 sur la Baltique et le 21 à Moscou. La bourrasque avait donc traversé le nord de l’Europe en décrivant une courbe et en se dirigeant d’abord vers les côtes de Norvège jusqu’au 62e degré de latitude, puis au sud-est jusqu’à Moscou. Cette tempête avait été précédée d’une première, qui s’était déchaînée le 15 novembre, et d’autres sévirent du 19 jusqu’à la fin de ce mois, resté célèbre par le nombre de naufrages qui eurent lieu sur les côtes de France et d’Angleterre.

Je pourrais emprunter au livre de M. Marié-Davy d’autres exemples de tempêtes ou bourrasques qui ont parcouru l’Europe ; toutes abordent notre continent par les côtes occidentales de France et d’Angleterre, et vont se perdre, en suivant des trajets divers, dans le centre de l’Asie. La plupart se dirigent vers le nord, quelques-unes inclinent vers le sud, mais toutes