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L'HISTOIRE ET L'IDEAL
DE LA
REVOLUTION FRANCAISE

La Révolution, par M. Edgar Quinet, 2 vol., 1865.

Dans un traité de philosophie morale écrit au lendemain de la terreur, Mme de Staël, n’ayant pu résister au désir d’exprimer tout haut ce qu’elle augurait de l’avenir de la république, s’excuse en ces termes d’avoir cédé à l’élan de son esprit : « Qu’on me pardonne de m’être laissé entraîner au-delà de mon sujet ; mais qui peut vivre, qui peut écrire dans ce temps et ne pas sentir et penser sur la révolution de France ? » Ce cri éloquent pourrait servir d’épigraphe à toutes les œuvres de M. Edgar Quinet. Lui aussi, quelque sujet qu’il traite, poésie ou philosophie, sentiment ou pensée, la révolution l’appelle. Il obéissait à cette voix impérieuse, il y a près de quarante ans, lorsqu’il composait tout jeune encore les intermèdes d’Ahasvérus. N’est-ce pas au nom de la révolution que le rêveur épique, transformé en Aristophane, adressait reproches et conseils aux spectateurs du mystère ? « Voilà, spectateurs, bourgeois, marchands, citoyens, ce que j’avais à dire sur ce qui vous concerne. Le temps presse, je ne puis rien ajouter. Ceux qui vous parlent autrement que moi, ne les entendez pas ; ôtez-les de vos assemblées et de vos gouvernemens, et regardez-les comme vos méchans ennemis, car si vous suivez d’autres conseils que les miens, vous vous en repentirez, et la chose publique périra. » C’est ainsi