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très grave pour une monarchie exposée comme la monarchie autrichienne à d’incessans périls. Enfin, et c’est l’objection politique la plus grave au point de vue des intérêts autrichiens, s’il prenait fantaisie à l’empereur du Mexique, soudainement appelé au trône d’Autriche, de cumuler les deux couronnes, dans quelles ruineuses complications la politique autrichienne ne serait-elle pas engagée ! Se figure-t-on l’Autriche entraînée par le caprice de son souverain à lutter pour conserver en Amérique une domination que l’Espagne, après une possession de plusieurs siècles, a été obligée d’abandonner ! Imagine-t-on l’Autriche encourant la chance d’entreprendre et de soutenir au Mexique des expéditions dans le goût de celle qui a tant pesé à, la France ! Nous ne sommes donc point surpris de ce qui vient de se passer à Vienne, Un conseil de famille, un conseil composé de nous ne savons combien d’archiducs, a décidé que l’archiduc Maximilien devrait, en acceptant la couronne du Mexique, faire l’abandon de ses droits héréditaires en Autriche. Cette décision nous paraît juste et sage. On prétend qu’elle a étonné l’archiduc Maximilien ; on prétend qu’à la suite de la résolution du conseil des archiducs une vive controverse s’est engagée à coups de télégrammes entre Miramar, Paris et Vienne. Au point où les choses étaient arrivées, ce subit émoi nous étonne. L’archiduc Maximilien ne peut plus refuser ni de partir pour le Mexique, ni de donner la renonciation que sa famille et son pays lui demandent. Il ne faudrait pas que l’archiduc mît en avant le sacrifice de ses prétentions dynastiques en Autriche pour obtenir comme compensation du gouvernement français des engagemens positifs d’avenir qui accroîtraient encore la charge des engagemens moraux que nous avons contractés envers lui. En acceptant l’œuvre qui s’offre à lui au Mexique, et qui, si elle est hérissée de difficultés, n’est point sans promesse de gloire, il convient à l’archiduc Maximilien de ne point frapper dès le début son entreprise de discrédit. Or comment l’archiduc serait-il en droit d’obtenir pour son nouvel empire la confiance des Mexicains, des capitalistes d’Europe et des gouvernemens, s’il se montrait lui-même défiant de l’avenir, et s’il laissait lire dans son cœur, en quittant l’Europe, une intime pensée de retour ? — La renonciation aux droits dynastiques autrichiens, l’archiduc Maximilien la doit au Mexique et à la France bien plus encore qu’à sa famille et à l’Autriche. Lorsque l’on a voulu ou consenti à vouloir être empereur du Mexique, il faut faire de la couleur locale, il faut imiter Fernand Cortez, il faut brûler ses vaisseaux.

Nous nous refusons donc à croire que cette complication, qui semble avoir été une surprise pour les politiques de profession aussi bien que pour l’opinion publique, ajourne longtemps l’acceptation définitive de l’archiduc Maximilien, et retarde la solution au moins momentanée de l’affaire mexicaine. Si de la question du Mexique nous passons à la question dano-allemande, on nous dispensera de justifier sur ce point le reproche général d’incohérence et de confusion que nous adressons à l’action gouvernemen-