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cidé que la carte des îles britanniques serait publiée à trois échelles différentes : d’abord à l’échelle de 25 pouces par mille (soit au 2,500e environ), pour servir à l’établissement de l’impôt et à la délimitation des héritages, puis à l’échelle de 6 pouces par mille, pour les opérations militaires et les travaux publics, et enfin à l’échelle de 1 pouce par mille (c’est-à-dire au 63,360’), ce qui donne une véritable carte topographique dans des conditions analogues à la nôtre[1].

L’exécution de cette carte à triple échelle est confiée à une administration spéciale (ordnance survey office), sous l’habile direction d’un ingénieur, sir Henry James, qui, pour accélérer le travail sans en diminuer la précision, a su mettre en pratique d’heureux perfectionnemens. Il est de principe que les cartes-minutes dressées sur le terrain ne peuvent être amplifiées, parce qu’en élargissant le dessin on risquerait d’en altérer les proportions. Elles peuvent seulement être réduites à une échelle moindre, pourvu qu’à chaque réduction on supprime tous les détails trop minutieux qui surchargeraient une feuille de moindre étendue et y produiraient la confusion. Les minutes sont par conséquent levées à l’échelle cadastrale et subissent des réductions successives. Jusqu’à ce jour, les réductions d’échelle étaient faites au moyen du pantographe, instrument sûr, mais lent, dont les graveurs font un usage fréquent pour reproduire les dessins avec des dimensions variables. On s’est servi pour les cartes anglaises d’une méthode différente qui donne d’excellens résultats. — Voici, en résumé, la série complète des opérations. Après que la triangulation de troisième ordre a donné la position de tous les objets remarquables d’une contrée, clochers, arbres isolés, etc., des arpenteurs retournent sur le terrain pour relever avec la chaîne, qui est le plus simple des instrumens topographiques, les détails de tous ces petits triangles que forment les signaux géodésiques. Les distances, ainsi mesurées et inscrites sur

  1. Il a été reconnu qu’il était avantageux de posséder de bonnes cartes à l’échelle cadastrale, avec des indications complètes sur les pentes du terrain et tous les accidens du sol, parce que les ingénieurs sont alors dispensés de lever les plans spéciaux dont ils ont besoin pour les travaux de drainage, de mines, de fortifications, etc. Par malheur, le gouvernement anglais ne s’est décidé à entreprendre le plan cadastral de tout le royaume qu’en 1862, à une époque où la plus grande partie du territoire était déjà levée à l’échelle de six pouces, ou même seulement d’un pouce par mille. Tous les travaux topographiques exécutés plus anciennement devront être recommencés, et l’opération entière, dont la dépense est évaluée à 35 millions de francs, ne peut durer moins d’une vingtaine d’années, quelque activité que déploient les ingénieurs géographes, et quelque régulières que soient les allocations budgétaires. Il n’est pas hors de propos de rappeler que le comité d’enquête, dont le rapport a provoqué l’adoption de cette mesure, s’exprimait ainsi à l’occasion de la dépense qu’il prévoyait : « Si considérable que soit le prix de revient d’une carte cadastrale, les avantages en sont si grands pour le pays que c’est un judicieux emploi de la fortune publique. »