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dans toute l’étendue de la monarchie, et modifiant par suite l’ordre de succession, fut présentée aux chambres danoises, adoptée après discussion, et signée le 31 juillet 1853.

Ainsi, dans la prévision d’une incertitude fort périlleuse au moment de l’ouverture de la succession en présence de plusieurs droits, les uns incontestables, les autres douteux, les grandes puissances, de concert avec la cour de Danemark, ont délibéré ; les renonciations nécessaires ont été aimablement obtenues et légalement constatées ; on a réuni sur la tête d’un même prince tous les droits, de quelque part qu’ils vinssent. France, Angleterre, Prusse, Autriche, Russie, Suède et Norvège, ont signé le traité de Londres ; puis toutes les autres puissances, excepté seulement cinq cours allemandes de second ou de troisième ordre, y ont accédé, et de la sorte une transaction vraiment européenne, obligeant chacun des signataires, a été donnée pour base respectable et solide au principe de l’intégrité d’une antique monarchie. C’est pourtant cette ferme assise que l’Allemagne a paru compter absolument pour rien. Le traité de Londres du 8 mai 1852, que les grandes puissances allemandes ont signé, n’existe plus pour la confédération germanique à partir du jour où se produit la situation qu’il a été destiné à régler !

À vrai dire, cette levée de boucliers n’est pas chose faite à l’improviste. On y a préludé pendant ces dix dernières années par quelques sourdes et timides mesures où se traduisait un dépit impuissant. On peut remarquer par exemple que l’acte international du 8 mai 1852 a été presque toujours désigné, dans les écrits et dans le langage des Allemands, par le nom de protocole et non pas de traité de Londres. C’est une confusion grave. Il y a eu avant le traité trois protocoles signés à Londres en juillet et août 1850, et auxquels la cour de Prusse n’a pas pris part ; mais ce ne sont que des actes préparatoires sans une véritable importance : en refusant à la convention du 8 mai le titre qui lui appartient, et que lui ont donné les grades puissances, on a voulu apparemment, par un artifice puérile en affaiblir le caractère moral. Autre détail : le traité de Londres n’est pas imprimé dans le célèbre recueil de Martens ; or le volume qui devrait contenir cette pièce assez importante a été publié par les soins de M. Samwer, conseiller privé de Saxe-Cobourg-Gotha et aujourd’hui sans doute premier ministre du prétendant. — On a hasardé aussi pendant ces dernières années ce bizarre raisonnement, que le traité de Londres avait perdu toute vigueur par suite de la guerre survenue entre la Russie et les puissances occidentales. comme si cette guerre avait pu délier chacune des trois cours cosignataires des obligations contractées en commun à l’égard d’un tiers. Du reste ce raisonnement insoutenable n’a pas reparu, et