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le marquis de Blosset, le baron d’Espagnac, le marquis de Bonne-val, le comte de Chabrillant, le comte de Poix, le comte de La Roche-chevreux, le marquis de Bouthillier et le marquis de Sancé ; pour le tiers-état, huit bourgeois ou propriétaires de ville, et huit propriétaires habitans des campagnes : après quoi, la session provisoire fut close, et la véritable session renvoyée à un mois, pour que le roi pût dans l’intervalle agréer les nouveaux membres.

Ce qui frappe le plus dans cette organisation, c’est l’active participation du clergé. On a trop généralement oublié la véritable situation du clergé à la veille de 1789. L’institution des commendes, en se généralisant, avait fait, à tort ou à raison, de ses principaux membres de véritables fonctionnaires publics, que le choix du roi élevait, de bénéfice en bénéfice, jusqu’aux plus hautes dignités. La plupart avaient l’esprit et le goût des affaires en même temps qu’une forte instruction classique. Necker comptait beaucoup sur eux pour le succès de ses assemblées. Mirabeau écrivit à ce sujet un pamphlet contre le ministre, qu’il appelait Narsès. « Narsès, disait-il, n’ose pas être du parti du peuple et craint d’être repoussé par celui de la noblesse ; il se flatte de trouver dans le clergé un parti intermédiaire qui modérera l’effervescence des deux autres. » Cette observation passait alors pour une critique ; ne pourrait-on pas aujourd’hui la considérer comme un éloge ?

Ainsi composée, l’assemblée du Berri se réunit à Bourges le 10 novembre 1778. Le 11, elle se rendit processionnellement à la cathédrale, l’archevêque en tête, pour y entendre une messe du Saint-Esprit ; la milice bourgeoise formait la haie, et l’intendant de la province, M. Faydeau de Brou, assistait à la cérémonie. Le 12, l’assemblée commença ses travaux en se partageant en quatre bureaux : le bureau des impositions, celui des travaux publics, celui de l’agriculture et du commerce, et celui du règlement. Le premier qui fut prêt fut celui du règlement ; il avait choisi pour rapporteur l’abbé de Séguiran. Necker avait laissé en suspens la forme à suivre pour le renouvellement de l’assemblée. Le bureau proposait que les membres sortissent par tiers, de trois ans en trois ans, mais il ne pensait pas que le choix des remplaçans dût continuer à être fait par le roi ou par l’assemblée elle-même. « Ce genre de nomination, disait le rapporteur, est peu fait pour concilier à l’administration provinciale l’affection des peuples, parce qu’il ne flatte aucunement les citoyens par l’opinion d’un concours quelconque à la manutention des affaires publiques. Si, désignés dans le principe par la volonté du souverain, les administrateurs se reproduisent les uns par les autres, ils n’auront jamais reçu leur mission de la province. Ils la représenteront sans avoir son aveu et ne paraîtront aux yeux de la multitude qu’un tribunal établi pour substituer l’autorité de plusieurs à l’autorité