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tion, à rétablir son crédit, à porter son revenu au niveau de ses dépenses. Dussent tous les biens de mainmorte être aliénés pour solder une telle œuvre, il n’y aurait pas sans doute matière à regrets. A coup sûr, les résultats acquis devaient encourager à tenter de nouveaux et de plus grands efforts; mais au moment où le ministre de fomento était autorisé, en vertu de la loi du 1er avril 1859, à préparer une augmentation de travaux dignes de la grandeur de la monarchie, une dépense imprévue vint grever le budget en cours d’exercice et en détruire l’économie: la guerre fut déclarée au Maroc le 22 octobre.

Dès le mois de mai précédent, le budget de 1860 avait été présenté aux cortès. Il comprenait 1 milliard 834 millions de dépenses ordinaires contre 1 milliard 840 millions de recettes de même nature, et les dépenses et recettes extraordinaires s’élevaient à 302 millions 1/2. Le maximum de la dette flottante était maintenu à 640 millions. Le projet de loi soumis aux chambres le 21 octobre 1859 porta, en raison des nécessités de la guerre, les dépenses ordinaires à 1 milliard 887 millions. L’armée, qui sur le pied de paix ne dépassait pas 50,000 hommes, fut tout d’un coup élevée à 100,000. Par suite de cette augmentation, le maximum de la dette flottante atteignit 740 millions, et pour faire face à l’excédant des dépenses ordinaires aussi bien qu’aux frais extraordinaires qui pourraient résulter de la guerre, le ministère proposa des modifications aux droits d’hypothèque, aux tarifs des contributions de consommation, de timbre et d’enregistrement; enfin il demanda une surtaxe de 12 pour 100 sur les contributions directes, de 10 sur l’impôt commercial et industriel, de 8 et de 10 pour 100 sur les traitemens. Tous ces changemens furent sanctionnés par la loi du 25 novembre 1859, et les recettes ordinaires évaluées à 1 milliard 892 millions. Le gouvernement fut autorisé à dépasser même le chiffre de 100,000 hommes pour l’armée active, et à disposer à cet effet des crédits prévus par la loi du 1er avril 1859 et applicables aux ministères de la guerre et de la marine sur les 2 milliards que cette loi permettait de dépenser en huit années. Le décret du 10 février 1860, qui ouvrit une émission de billets du trésor jusqu’à concurrence de 200 millions, détermina la limite dans laquelle le gouvernement entendait user du bénéfice de cette loi, dite des 2 milliards.

Nous n’avons pas à retracer les faits militaires qui ont donné un nouveau lustre aux armes espagnoles : ce qui importe surtout au sujet de cette étude, c’est la facilité avec laquelle le trésor public pourvut aux dépenses d’une guerre aussi favorable au crédit qu’utile à la gloire de la nation. En présentant le 15 juin 1860 le budget de 1861, le ministre des finances disait: « Nous avons traversé la période,