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Si maintenant l’on veut connaître le produit brut de la culture pratiquée dans de pareilles conditions, on verra qu’il est considérable. La statistique officielle porte la somme des produits agricoles de la Belgique entière à près d’un milliard, ce qui, pour les 2,945,593 hectares de superficie totale, donnerait une moyenne de 340 francs par hectare. Cette évaluation est trop élevée, parce qu’elle comprend des élémens qu’on ne peut faire entrer en ligne de compte ; mais si, au lieu d’appliquer la moyenne de 340 francs à tout le royaume, on la restreint aux deux Flandres, on sera bien près de la vérité, car la moyenne du département du Nord est portée à 300 fr. Ce qui prouve du reste que la production de l’agriculture flamande doit être plus grande que celle de tout autre pays, sauf peut-être la Lombardie, c’est qu’elle nourrit la population la plus dense de l’Europe : 1 habitant par 44 ares de superficie territoriale, et qu’en outre elle exporte encore en France et en Angleterre pour une valeur notable de produits agricoles[1]. Le nombre même des cultivateurs est une preuve nouvelle de la masse des produits que leur travail livre à la consommation générale. Pour exploiter 100 hectares de surface productive, on trouve dans la Flandre occidentale 65 personnes, et 103 dans la Flandre orientale, tandis que, d’après M. de Lavergne, pour cultiver la même étendue, il n’en faut que 30 en Angleterre, 40 en France et 60 en Irlande. Quoique l’étendue productive pour chaque travailleur agricole soit plus réduite en Flandre que dans tout autre pays, même l’Irlande, il n’en parvient pas moins à nourrir plus de deux personnes étrangères à l’exploitation du sol. La population rurale ne forme ici que le tiers de la population totale ; en France, elle en compose les quatre septièmes. C’est dans la Flandre orientale, pays de petite culture par excellence, que la statistique présente les chiffres qui attestent le plus clairement la perfection des procédés et la masse des produits que donne une terre si morcelée. Là chaque cultivateur, n’ayant pour exercer son industrie qu’un peu moins d’un hectare, parvient à nourrir presque autant de personnes que le cultivateur anglais, qui dispose de trois hectares de terrain productif. La valeur des terres et le taux des fermages viennent se joindre aux précédentes indications pour prouver combien le produit brut doit être considérable. Le prix moyen de l’hectare était porté par la statistique officielle de 1846 à 2,426 fr. pour la Flandre occidentale, à 3,218 fr. pour la Flandre orientale ; le prix des baux, en sus de toute charge, à 73 fr. Dans la première des deux provinces, à 93 francs dans la seconde. Pour avoir les chiffres de 1860, il faudrait augmenter ceux de 1846 d’au moins

  1. La Flandre occidentale seule a exporté en 1859 pour une valeur de près de 20 millions de produits agricoles.