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de telles questions, nous aurions été tentés de voir une garantie de paix dans cette nouvelle organisation, lorsque nous l’entendions critiquer par certaines autorités militaires ; mais les civils qui connaissent le projet nous mettent en défiance contre cette impression en nous disant qu’au lieu d’une économie, le nouveau projet pourrait bien au contraire apporter une augmentation au budget des dépenses de la guerre. D’ailleurs, quand nous aurions qualité pour nous prononcer sur de telles questions, en pourrions-nous sérieusement juger sur des ouï-dire ? Sachant que les maréchaux ont été consultés, nous devons supposer que le projet adopté exprime les conclusions de l’expérience militaire la plus élevée qui existe en France. Dans cette confiance, s’il est vrai, comme on l’assure, que le décret organique du système nouveau ait déjà reçu la signature impériale, nous en attendons la publication avec cette patience docile qui est une des déférences que nous devons au principe d’autorité. Nous sommes patiens, et pourtant nous ne sommes pas Allemands. La bienheureuse confédération germanique s’occupe plus que personne, et depuis plus longtemps que tout le monde, de la réforme de ses institutions militaires : peut-elle dire qu’elle soit aussi près que nous de toucher au terme ? Nous ne serions point pardonnes, si nous omettions l’Allemagne dans ce farewell que nous adressons en courant aux pensées et aux efforts militaires de l’Europe. La question militaire allemande mérite d’être touchée non pas seulement pour nous dérider en un si grave sujet, mais pour nous donner la conviction consolante que, si jamais par malheur il nous survenait une querelle d’Allemands, nous ne courrions guère de ce côté le danger d’être battus de vitesse.

La question de la réforme militaire fut abordée l’an dernier par les états de second ordre. Ils voulaient remanier le commandement de l’armée fédérale, mais naturellement avec une réserve : c’est que le principe de l’unité de commandement serait respecté. L’idée de réforme souriait à la Prusse, à une condition toutefois, c’est qu’en temps de guerre les contingens fédéraux fussent incorporés aux armées de l’Autriche et de la Prusse, et le commandement en chef partagé entre ces deux états. Là-dessus protestation, opposition énergique des gouvernemens secondaires appuyés par l’Autriche. La Prusse cède à l’orage et fait une autre proposition : elle demande que son système concernant le commandement en chef soit adopté, au moins pour le cas où les deux grandes puissances allemandes prendraient part à une guerre fédérale, non pas seulement avec leurs contingens fédéraux, mais avec la totalité de leurs forces. La distinction paraissait si fondée que les petits états ne purent la contester, mais ils ne voulurent pas la consacrer par une stipulation immédiate ; ils dirent qu’il serait temps d’aviser quand se présenterait l’éventualité prévue par la Prusse. La question en était là quand la diète entra cet été en vacances. Vinrent alors les entrevues de Bade et de Tœplitz, motivées en grande partie par la nécessité d’arriver à une entente sur cette question capitale pour l’organisation militaire de l’Allemagne. Les