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ganisation, toutes les fonctions s’expliquent facilement, comme les combinaisons et les décompositions des corps. Cette force initiale est sans doute contenue dans le germe ou dans la graine qui la communique à l’être qui naît, lequel à son tour en transmet une parcelle à ceux qu’il produit. Or, dans les animaux faits spontanément, d’où viendrait cette force qui à beaucoup de naturalistes semble nécessaire ? Faut-il penser que la vie des infusoires soit le résultat de la division d’une vie plus complète qui se décompose pendant la putréfaction, et que les âmes de ces infusoires, si l’on peut parler ainsi, soient les parcelles d’une âme plus parfaite ou plus forte ? Une quantité immuable de matière forme le monde et sert en se décomposant sans cesse, mais sans s’user jamais, aux générations qui paraissent se renouveler. En est-il de même de la force vitale des animaux, et sommes-nous témoins d’une métempsycose d’une nouvelle espèce ? Cependant les microzoaires naissent très bien dans les infusions végétales, et on ne comprend guère comment les débris de la vie d’une plante peuvent animer des êtres qui lui semblent supérieurs. Ces débris, il est vrai, pourraient s’accroître et s’accumuler comme la matière elle-même ; mais une vie qui se divise, qui s’accroît, qui s’augmente, qui peut rester à l’état latent dans une matière amorphe, est très peu compréhensible, et les difficultés naissent à chaque pas. Ajoutons pourtant que ces difficultés sont plus grandes pour ceux qui pensent que la vie est une force particulière implantée dans l’organisation, comme nous le supposons ici, que pour les physiologistes qui admettent que la vie est le résultat de l’organisation elle-même. Pour ces derniers, toute organisation formée et complète s’anime nécessairement, et la force vitale, comme la chaleur et l’électricité, est produite par des combinaisons déterminées. Alors tout devient plus facile : il suffit d’expliquer par la chimie et les affinités la production de ces combinaisons complexes qu’on appelle des microzoaires, et ces composés se trouveraient aussitôt animés, de même qu’un cristal formé d’élémens connus présente des formes et des propriétés particulières.

La matière se présente sous trois états : elle est minérale, organique ou organisée. Longtemps on a cru que ces formes étaient aussi différentes que la vie et la mort, et qu’une barrière infranchissable les séparait. Avec les minéraux ou leurs élémens, on ne faisait point dans les laboratoires de matière organique ; à plus forte raison les chimistes ne transformaient-ils point celle-ci en tissus ou en organes, en substances propres à la vie. Nécessairement les végétaux devaient puiser dans le sol ou dans l’atmosphère des dissolutions de sels, et, en combinant leurs élémens, produire les substances organiques, les principes immédiats indispensables à la vie des ani-