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qui approchât même du rouge sombre, car cette température communiquée, ne fut-ce qu’en quelques points, aux grains de café, dépasse le terme utile de la caramélisation, décompose une portion notable des substances azotées et développe des produits pyrogénés d’une odeur très désagréable.

Un ancien ouvrier forgeron nommé Vandenbrouck, comprenant combien il est difficile d’éviter cet inconvénient du contact des parois souvent trop chaudes ou inégalement chauffées, a imaginé un moyen ingénieux, simple et très efficace, de régulariser la température. Ce moyen consiste à maintenir constamment à une petite distance des parois en tôle tous les grains de café, en disposant à l’intérieur du cylindre une sorte de canevas métallique fixé parallèlement aux parois, en sorte que la torréfaction s’effectue dans un bain d’air qui la garantit de tout excès d’échauffement et transmet au café la température moyenne convenable[1].

Quelques phénomènes intéressans se succèdent pendant la torréfaction du café. C’est d’abord, quand arrive la température de l’ébullition de l’eau, des vapeurs aqueuses qui se dégagent, accompagnées de traces graduellement plus prononcées de l’essence la plus volatile. Puis une sorte de caramélisation commence, occasionnant dans tout le tissu des grains un gonflement resté inexpliqué jusqu’au moment où l’on eut découvert l’existence du sel double de chloroginate de potasse et de caféine interposé dans le tissu végétal. En effet, ce composé, remarquable à plus d’un titre, se tuméfie, se boursoufle sous l’influence de la chaleur, entraînant avec lui le tissu tout entier, qui, abandonné à lui-même, eût éprouvé au contraire, comme la cellulose, qui en compose la portion résistante, une notable réduction dans son volume. Dans le périsperme du café, la torréfaction au degré utile, sous l’influence qui vient d’être indiquée, augmente le volume de chaque grain d’un tiers environ, en même temps que le dégagement en vapeur de l’eau et de quelques produits pyrogénés diminue le poids total de 15 à 17 pour 100 ou d’un sixième environ. On a même fondé sur cette perte du poids un procédé mécanique qui indique le terme de l’opération : la brûloire dans ce cas est supportée par un balancier à contre-poids ; celui-ci fait basculer le vase torréfacteur et l’élève au-dessus du foyer dès que le terme assigné à la diminution du poids est atteint. Si l’usage de cet ingénieux appareil ne s’est pas généralisé, c’est qu’il est un peu plus coûteux que les autres, et doit être réglé suivant que l’on opère sur des cafés plus ou moins humides ou secs, de variétés différentes ;

  1. Cette invention utile a doublement profité à l’auteur : elle lui a valu, outre une clientèle assez nombreuse pour faire prospérer son modeste établissement, une récompense honorifique à l’exposition nationale de 1849.