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et la Russie on s’entendait « pour régler le sort de l’Italie, » comme on le disait, surtout pour substituer l’action collective de l’Europe à celle de l’Autriche, qui voulait agir seule, « avec l’approbation préalable et tacite » de tout ce qu’elle ferait. Le prince » de Metternich se hâta d’arrêter ces tendances, en dressant le fantôme révolutionnaire devant l’esprit de l’empereur Alexandre, et ce souverain à l’imagination généreuse et mobile, passant tout à coup d’une extrémité à l’autre, ne parlait de rien moins cette fois que de faire arriver une armée russe en Italie pour comprimer la révolution. La politique de M. de Metternich a produit tous ses effets aujourd’hui. Une chose curieuse à remarquer, c’est que, dès cette époque, l’appui du gouvernement du tsar était assuré au Piémont dans ses luttes diplomatiques avec l’Autriche. Une politique russe assez libérale en Italie ne serait donc point une nouveauté. On a parlé beaucoup, un instant de traités secrets entre la France et la Russie, et les ministres anglais ont révélé la portée de ces engagemens. La vérité est que la Russie est neutre, qu’elle arme comme toutes les puissances, et que de nouveaux événemens pourraient seuls l’entraîner dans la mêlée. Pour la Russie comme pour l’Angleterre, comme pour la France au surplus, la question, est moins aujourd’hui en Italie qu’en Allemagne, dans l’agitation extraordinaire de ce grand pays, livré depuis trois mois à toutes les émotions, enflammé par toutes les polémiques, et surexcité dans son patriotisme.

Le secret du développement, possible de la guerre ; actuelle, ce secret est en effet pour le moment au-delà du Rhin, et il n’est point ailleurs. L’Allemagne offre réellement depuis quelques mois, un spectacle dramatique. D’un côté, l’Autriche cherche à l’attirer vers elle en s’efforçant de la convaincre que sa puissance est menacée par une guerre en Italie, qu’elle doit faire cause commune avec la domination impériale au-delà des. Alpes. D’un autre côté, la Prusse, sans fermer les yeux sur les événemens, s’efforce de ramener l’action de l’Allemagne à la défense de ce qu’elle appelle les « intérêts véritablement allemands. » Entre les deux puissances qui sont les têtes de la confédération germanique, les autres états s’agitent, pressés par l’opinion et poussés chaque jour à des mesures ou à des propositions empreintes d’un caractère bien manifeste d’hostilité contre la France. Rien n’est plus dangereux, on le sait, que ces agitations, d’opinion, où les généreuses susceptibilités du patriotisme se mêlent aux excitations factices ou intéressées, qui se fondent sur des défiances insaisissables., et qui d’une guerre en Italie font aussitôt une guerre sur le Rhin. Ce qui émeut l’Allemagne, c’est évidemment la pensée dominante que la France obéit à un entraînement d’ambition, à une humeur renaissante de conquête, et que l’expédition, italienne, n ! est qu’un acte d’un drame, qui doit se dénouer ou se dérouler