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de Mynpoorie, où l’on fait halte, et là, on apprend que le commandant en chef est ou peut être à trente-huit milles seulement, du côté de Goorsahaigunge. Il s’agit de lui porter des dépêches. Hodson sollicite cette mission plus que difficile. Le 30 décembre, à six heures du matin, lui et Macdowell se mettent en route, avec une escorte de soixante-quinze sowars de leur régiment. A quatorze milles du camp qu’ils viennent de quitter, ils font halte, déjeunent, et laissent cinquante hommes de leur escorte. A quatorze milles plus loin, à Chibberamow, nouvelle station : n’ayant pas rencontré l’ennemi, ils croient pouvoir laisser encore les vingt-cinq cavaliers qui leur restaient. Quatorze milles franchis si près de l’armée anglaise paraissaient aux deux officiers une promenade toute simple, même en pays suspect. Malheureusement à Goorsahaigunge ils ne trouvent point le commandant en chef. Lord Clyde était à Mermuka-Seraï, leur dit-on, c’est-à-dire à quinze milles plus loin. On ajoutait qu’à deux milles de l’endroit où ils étaient arrivés stationnait une colonne ennemie de sept cents hommes. Contre ce danger, ils prirent la seule précaution qui fût à leur portée : ce fut de partir pour le quartier-général aussitôt que possible, avant que leur arrivée eût pu s’ébruiter. De fait, ils y arrivèrent sans encombre, mais non sans étonner le général anglais par le récit de leur imprudente équipée. Sir Colin Campbell retint Hodson et son compagnon à dîner, et à huit heures du soir les laissa repartir avec ses instructions pour la marche du convoi. De Mermuka-Seraï à Goorsahaigunge, le retour eut lieu sans obstacle et sans accident; mais à mi-chemin de cette dernière bourgade et de Chibberamow, les deux intrépides cavaliers rencontrèrent un Indien qui s’était posté sur leur route tout exprès pour leur donner avis d’un danger imminent. Les vingt-cinq cavaliers restés le matin même à Chibberamow avaient été attaqués par un corps ennemi, et avaient dû s’enfuir, non sans laisser quelques morts sur la place, quelques prisonniers aux mains des révoltés. Il était à supposer qu’à la suite du combat, une embuscade avait été laissée sur la route pour surprendre les deux chefs dont l’escorte venait d’être ainsi dispersée. A vingt milles du camp de sir Colin Campbell, à trente milles de leur propre camp, ces nouvelles n’avaient rien de très particulièrement agréable. Que faire cependant? Avancer ou battre en retraite? Le parti de Hodson fut bientôt pris : « Nous aurons toujours le temps de rétrograder!... Au galop! Il faut essayer de passer outre! » Et c’est ce qu’ds firent, lui et Macdowell, par une noire nuit d’hiver, un temps âpre et glacial, un vent qui les gelait jusqu’à la moelle des os. On sent presque le même frisson en les suivant du regard sur ce chemin semé d’embûches.


« ….. Nous avions fait passer nos chevaux du milieu de la route pavée sur