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quoi il les a tués de sa main. » Je réponds à cette question par une autre :— Quel eût été, sur la foule des assistans, l’effet d’une seule minute d’hésitation vraie ou simplement apparente? »


IV.

Les six derniers mois de cette vie aventureuse sont dignes des années qui les avaient précédés. Pas un jour de repos, une entreprise suit l’autre : des prouesses d’équitation à étonner les plus rudes chasseurs des trois royaumes. Le capitaine Hodson, qui allait devenir le major Hodson, passait des nuits entières à cheval, et avait fini par dormir en selle. Aucun de ses cavaliers ne faisait le coup de sabre comme lui; pas une lance n’était aussi terrible que la sienne à l’ennemi fugitif. Sa dextérité, son sang-froid dans ces rencontres corps à corps faisaient l’admiration de l’armée. « Il me semble le voir encore, écrivait un de ses compagnons d’armes, aux prises avec les plus braves, les plus furieux de ces rebelles, souriant, se moquant, parant les coups les plus terribles du même air qu’il eût écarté un essaim de mouches, et narguant son antagoniste par toute sorte de défis : « Eh bien! est-ce tout?... Recommençons!... Vous dites?... Et vous appelez cela de l’escrime? »

Le corps des cavaliers de Hodson fut séparé en deux pour les opérations qui suivirent la prise de Delhi. Un détachement suivit vers Agra la colonne sous les ordres du colonel Greathed; le reste accompagna celle du brigadier Showers, lancée à la poursuite des troupes fugitives sorties pêle-mêle de la capitale, et qui, on le sait, n’avaient pas osé rester en vue de la petite armée anglaise. Hodson les poursuivit sans relâche pendant tout le mois d’octobre. En novembre, il obtint un congé de quelques semaines, pour aller à Umballah revoir sa femme, séparée de lui depuis six mois entiers. H profita d’ailleurs de ce répit pour pousser avec une extrême activité le recrutement du corps qu’il avait créé. « Je compte, écrit-il, le porter à mille cavaliers avant la fin de l’année. Les plus braves et les mieux nés du pays se pressent sous mon étendard. »

Le 2 décembre, un immense convoi descend vers Cawnpore, où il va ravitailler le camp de sir Colin Campbell. Ce convoi, marchant sur une longueur de quinze milles, n’a pour escorte qu’une colonne mobile de quinze cents hommes. Les Hodson’s horsemen en font partie, sous les ordres de Hodson et de son fidèle lieutenant Macdowell. Chemin faisant, on rencontre l’ennemi, ou, disons mieux, on se détourne pour l’aller joindre. On le bat, on le disperse, on le poursuit. Trois combats sont livrés coup sur coup; vingt-cinq canons sont enlevés aux rebelles. Le 27 décembre, on prend la ville