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de 1 million sterl. et demi. Une route qui doit mettre en communication directe Calcutta et Bombay est aussi en cours d’exécution et terminée jusqu’à Ahmednuggur, sur un parcours de 150 milles. Enfin une route, macadamisée en partie, réunit Bombay à Agra, et les dépenses totales se sont élevées à 243,670 livres sterling pour un développement de 734 milles, soit une dépense moyenne au mille de 330 livres sterling. Cependant l’importance des voies de communication ordinaires, quelque grande qu’elle soit, disparaît devant celle des chemins de fer en cours d’exécution dans les trois présidences, et dont il faut dire quelques mots.

Depuis plus de dix ans, la question des chemins de fer de l’Inde est soumise à la discussion publique et a soulevé une polémique brûlante entre des partisans passionnés et des adversaires systématiques. Les spéculateurs atteints de la fièvre des rail-ways ne pouvaient en effet rencontrer des adversaires plus antipathiques d’instincts et d’habitudes que ces vieux serviteurs brahminisés de la compagnie, qui exercent un contrôle presque tout-puissant sur les affaires intérieures de ses domaines. La question des chemins de fer mettait en présence l’esprit d’innovation et d’entreprise, le génie du go a head, et l’esprit de tradition et de haine aux changemens dans son expression la mieux définie et la plus complète. La lutte devait être acharnée et le fut en effet. Si les uns enfantèrent des projets chimériques de chemins de fer que Wishnou et Brahma, au temps de leur toute-puissance, eussent seuls pu réaliser, les autres firent valoir avec une violence obstinée, en manière d’argumens péremptoires, les inondations périodiques des bas pays, les pluies torrentielles de la mousson de nord-est, la prompte détérioration des bois, l’ardeur du soleil et des vents chauds, l’exubérance de la végétation souterraine sous un climat tropical, tous argumens contraires qu’une enquête sérieuse d’hommes compétens devait réduire à néant, tout aussi bien que le bon sens public avait fait justice des projets insensés. En effet, il suffisait de mettre à profit les ressources de l’art dans un tracé savant pour garantir les ouvrages de la voie ferrée contre les inondations périodiques, mais partielles seulement, qui affligent le Bas-Bengale. Le bois de teak, si commun dans ces contrées, résiste victorieusement à la double épreuve de l’humidité et des insectes. Quant aux objections tirées de l’exubérance de la végétation souterraine, de l’élévation de la température, etc., les chemins de fer en activité dans les États-Unis du sud, à Cuba et à la Jamaïque prouvent assez que ce ne sont pas là des obstacles invincibles dont l’art moderne et des soins minutieux ne puissent triompher. Ces objections résolues victorieusement par des hommes compétens, l’on pouvait regarder la cause des chemins de fer de l’Inde