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dispositions nouvelles. L’appareil tabulaire à triple effet de M. Rillieux, construit et perfectionné en France par M. Cail, en Autriche par M. Robert à Sellowitz, utilise, dans l’une de ses trois chaudières tabulaires closes, la vapeur qui a développé de la force mécanique en passant par une machine sans condensation ; il utilise en outre d’autres vapeurs naguère perdues de l’usine. On détermine ainsi l’ébullition du jus (clarifié par la chaux, puis par l’acide carbonique, et filtré au travers du noir animal), et on peut diriger la nouvelle vapeur émanée du jus de betterave vers deux autres chaudières semblables, où elle sert encore à concentrer les sirops jusqu’à 25 degrés, et au besoin même termine la cuite à l’aide de pompes à air. La machine, opérant une diminution de pression graduée ou proportionnée à la concentration qui donne aux sirops plus d’affinité pour l’eau, régularisé cette opération à la volonté de l’ouvrier chargé de ce soin. Aucune vapeur ne se répand dans l’usine, puisque toute l’opération se pratique en vase clos. L’eau distillée produite par la condensation des vapeurs sert à l’alimentation des générateurs, en évitant les incrustations que pourraient déterminer les eaux naturelles plus ou moins calcaires ou séléniteuses[1].

Le succès de l’appareil à triple effet et à chaudières tabulaires donna l’idée d’un autre procédé. On se proposa de remplacer, dans les sucreries, les générateurs et bouilleurs usuels par des générateurs tabulaires semblables à ceux des locomotives. M. Cail, qui conclut et réalisa cette idée, on a récemment obtenu d’heureux résultats, à la condition d’extraire préalablement de l’eau d’alimentation les sels calcaires capables d’incruster les tubes.

On vient de voir comment le jus de betterave est amené sans difficulté à l’état de sirop marquant 25 ou 26 degrés à l’aréomètre Baume. Il est alors filtré une deuxième fois au travers du noir animal en grains, puis immédiatement soumis à une dernière évaporation appelée cuite, qui s’effectue ordinairement dans une chaudière du système d’Howard, en communication avec des pompes destinées à extraire l’air, les vapeurs, etc. La cuite terminée, le sirop est cristallisable ; mais alors il fallait naguère une série d’opérations minutieuses, longues et chanceuses, pour obtenir le sucre en cristaux égouttés, puis épurés, pour réunir les sirops, les faire cristalliser, pour faire égoutter les cristaux de deuxième jet, les épurer, etc. Aujourd’hui ces diverses opérations sont devenues faciles,

  1. Dans les colonies, les circonstances sont bien moins favorables à l’application du système Rousseau pour l’extraction du sucre de canne. En effet, la proportion de sucre est deux fois plus grande dans le jus de la canne que dans le jus de la betterave, tandis que les substances étrangères y sont quatre fois moindres. Il y faudrait donc employer à peu près le double de chaux et d’acide carbonique.