Page:Revue des Deux Mondes - 1855 - tome 11.djvu/562

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

ces choses. » Ces traités sont intitulés, l’un : Des Airs, des eaux et des lieux, l’autre : de l’Ancienne médecine. On a beaucoup douté de l’authenticité du second, et je conviens que les preuves historiques données en sa faveur sont faibles ; mais à la supériorité du style, à l’élévation des pensées, à la généralité des vues, on reconnaît sans peine l’auteur des Aphorismes, des traités des Airs, des Eaux et des Lieux, et du Régime dans les maladies aiguës. L’ouvrage du reste ne fait qu’exposer très clairement une théorie qui résulte de la collection tout entière, et qui sans doute était la théorie de l’école de Cos. Dans tous les livres de cette école, on retrouve l’alimentation, le régime, le climat, les airs, les eaux et les lieux indiqués comme causes des maladies.

Pour Hippocrate en effet, c’est de toutes ces causes que dépend la santé, et la première occupation du médecin doit être de rechercher les effets que chacune des saisons de l’année peut produire sur les hommes. En arrivant dans une ville nouvelle, on doit en étudier d’abord le climat, les eaux et la nature du terrain. C’est de ces élémens divers que dépendent la constitution et la santé des citoyens, et c’est en les modifiant que le médecin doit guérir. Le traité tout entier expose les effets des vents d’est ou d’ouest, du sud ou du nord sur la santé et même sur l’intelligence et le moral. Chaque maladie est propre à certains pays et à certaines saisons, et la nature du climat doit influer sur le traitement. Souvent la maladie produite par l’été ne se développe que pendant l’automne : c’est une sorte de germe déposé dans l’organisme par une saison et amené par l’autre à sa maturité. Lorsque la seconde saison est tout à fait contraire à la première, la maladie se guérit seule. Le sol enfin a aussi de l’influence sur la constitution des hommes et même sur leurs formes extérieures, leurs qualités morales et leurs facultés intellectuelles. De même que les animaux ne se ressemblent dans aucun pays, de même les hommes subissent l’influence du sol et varient avec lui. Tel climat rend belliqueux, tel autre rend doux et pacifique. Dans les pays tempérés, les hommes sont modérés et incapables des grands crimes comme aussi des grandes actions, et pour connaître le caractère d’une nation, il suffit d’étudier le pays qu’elle habite. Hippocrate cependant n’était pas Grec et n’avait pas habité Athènes impunément : à l’influence du climat il ajoute celle des institutions et des lois. Voici un passage célèbre du traité des Airs, des Eaux et des Lieux qui expose cette restriction à la théorie des climats, et qui pourra donner une idée du génie d’Hippocrate et de la grandeur de ses vues. La traduction en a été faite par un célèbre professeur dans une de ces leçons éloquentes qui ont animé et instruit l’ardente jeunesse de la restauration et qui ont manqué à la nôtre. « Si les Asiatiques sont plus inhabiles à la guerre et de mœurs