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sont les comètes d’Halley, d’Encke, de Biéla et de Faye. Au mois d’août prochain, la question sera décidée pour une cinquième comète, celle du père Vico, qui n’a encore été vue qu’une fois. La fameuse comète de trois cents ans de révolution, et qui était attendue pour 1848, n’a point encore reparu. Il est vrai qu’elle a obtenu des mathématiciens une permission de prolongation d’absence jusqu’en 1858, avec deux ans de plus ou de moins, en sorte que nous l’aurons, j’ose dire certainement, entre 1856 et 1860. J’ai déjà parlé bien des fois de cette comète aux lecteurs de la Revue, et mon impatience de la voir de retour ne fait que s’accroître d’année en année. Ce sera une belle acquisition pour l’astronomie qu’un astre qui, dans sa révolution triséculaire, tantôt rasant le soleil, tantôt s’en éloignant à d’immenses distances, vérifiera plusieurs des lois du mouvement, et sera pour la terre une espèce de courrier revenant voir tous les trois siècles si les hommes ont été en se perfectionnant pendant le cours d’une si longue période. Sa dernière apparition fut en 1556, époque de l’abdication de Charles-Quint, qui, dit-on, s’y décida à la vue de ce messager céleste qui semblait lui commander de résigner la puissance souveraine. Elle n’aura pas tant d’autorité en 1858.

La cosmogonie de Laplace n’est pas moins heureuse à expliquer l’origine de ces masses compactes désignées si justement sous le nom de pierres tombées du ciel, qui nous arrivent des espaces étrangers à notre terre. Il est en effet naturel de penser que toute la matière abandonnée par l’atmosphère du soleil ne s’est pas exactement réunie en une seule masse planétaire. Plusieurs portions de substance matérielle placées hors de l’action de la masse principale, y ont échappé provisoirement et ont dû faire comme de petites planètes minimes, circulant autour du soleil selon les mêmes lois que les grandes agglomérations, peuplant ainsi de petits corps invisibles tout l’espace céleste jusqu’à ce que la terre, venant à passer par là, les amène à elle par sa force attractive, les enveloppe dans son atmosphère qui les arrête, et enfin les précipite sur le sol en vertu de leur pesanteur. Mais le détail de ces curieux phénomènes nous écarterait des limites où nous voulons nous renfermer aujourd’hui. Je me borne à remarquer qu’on ne parle jamais avec effroi de ces chutes d’aérolithes qui ont été fatales à plus d’un individu de notre espèce, tandis que les pauvres comètes, les plus inoffensifs de tous les êtres, ont encore une assez mauvaise réputation. Une pierre volumineuse, tombée près d’Ensisheim, avait été suspendue par une chaîne à la voûte de l’église avec cette curieuse inscription dont je ne connais pas l’auteur : De hoc multi multa, omnes aliquid, nemo satis. Ce latin me parait ressembler beaucoup au style de Tacite. Il signifie que sur