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tableaux distincts, l’histoire de la contemplation physique du monde, c’est-à-dire le développement progressif de l’idée du Cosmos. Ai-je réussi à dominer un si vaste amas de matériaux, à saisir le caractère des phases principales, à marquer les voies, par lesquelles les peuples ont reçu des idées nouvelles et une moralité plus haute ? C’est ce que je n’ose décider... »

Nous arrivons maintenant au développement purement descriptif de la partie céleste du monde. Là nous aurons de la science d’observation, et, à la grande louange de l’auteur du Cosmos, plus complète que dans aucun ouvrage, même spécial, sur l’astronomie.


II.

Avec une hauteur de pensée qui domine la science des résultats de l’astronomie mieux que ne l’ont fait jusqu’ici les hommes spéciaux les plus éminens, l’auteur du Cosmos partage son sujet en deux sections : la science des étoiles d’une part, et de l’autre, celle du système solaire, en y comprenant le cortège des planètes, des satellites, des comètes, etc. Nous allons faire avec lui cet intéressant voyage dans le ciel.

De la partie de l’espace où nous sommes placés, nous n’apercevons sans doute qu’une petite portion des corps qui composent l’univers entier. Cependant, lorsqu’on dirige le télescope vers le ciel, on pénètre à des distances telles que l’on sent plutôt le besoin de revenir en arrière et de se replier vers notre soleil que de s’étendre par la pensée au-delà de cette limite si lointaine que nous atteignons déjà. Tâchons d’en donner une idée. Notre terre nous paraît immense par rapport à notre stature humaine. Cependant, si tous les habitans de la France se donnaient la main, ils en feraient aisément le contour, à peu près comme les voyageurs mesurent le tronc d’un arbre gigantesque par le nombre d’hommes qu’il faut pour l’embrasser. Ce contour est de 40 millions de mètres. Or le soleil est éloigné de notre terre de douze mille fois l’épaisseur de celle-ci, en sorte que si l’on mettait en ligne douze mille globes égaux en grosseur à notre terre, on comblerait l’intervalle qui nous sépare du soleil. La longueur de cette espèce de pont idéal dépasse tout ce que nous pouvons nous figurer en kilomètres et en distances itinéraires. En partant de l’homme, la terre est immense en ses dimensions; en partant de la terre au soleil, c’est une immensité de plus; mais du soleil au soleil le plus voisin, c’est-à-dire à l’étoile la plus voisine (car personne n’ignore aujourd’hui que les étoiles sont des soleils lointains affaiblis par la distance dans leurs dimensions et dans leur éclat), la distance est au moins deux cent mille fois la distance de la terre au soleil.