Page:Revue des Deux Mondes - 1853 - tome 3.djvu/976

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

spirituels a le quadruple caractère apostolique, prophétique, évangélique et pastoral. L’ange gouverna chaque église particulière, et il est assisté par les anciens et les diacres ; mais le gouvernement de l’église universelle appartient à Dieu, autrement dit aux apôtres appelés par l’Esprit saint, et qui relèvent directement du Seigneur. Ce sont ces apôtres du Saint-Esprit qui désignent les prophètes, les évangélistes et les pasteurs choisis dans l’ordre des anges ou inspecteurs.

Les Irvingiens justifient cette hiérarchie en l’appuyant sur les Actes des Apôtres, les Epîtres, l’Apocalypse, et même sur les prophètes de l’Ancien Testament. Ce n’est, disent-ils, que par une usurpation que l’un des anges ou évêques, celui de Rome, s’est emparé de l’autorité. Les fonctions de prophètes ont été depuis longtemps abandonnées, elles sont tombées en désuétude, parce que les chrétiens ont négligé l’imposition des mains et l’invocation du Saint-Esprit, par le moyen desquelles les apôtres communiquaient ce don merveilleux. Ils faisaient, disent-ils, l’acte de foi, et le prophète donnait son oracle conformément à cet acte. Les Irvingiens ont transporté cette pratique dans leur église. Il faut, selon eux, la plus grande prudence dans l’exercice du don de prophétie, car l’esprit du mal imite souvint la voix du Consolateur. Tantôt c’est l’Esprit saint qui parle par la bouche même du prophète et qui lui dicte les mois qu’il emploie, tantôt il ne fait qu’illuminer son intelligence, et il le laisse lui-même choisir ses expressions.

Dans leur liturgie, dans le costume qu’ils ont adopté pour leurs prêtres, les irvingiens s’efforcent aussi de revenir à la primitive église ; ils ne s’appuient que sur des passages positifs du Nouveau Testament. Leurs dogmes n’offrent rien de bien exclusif. Les Irvingiens admettent, parmi eux des chrétiens de toutes les communions, et se défendent avec force de l’idée de constituer une secte à part. Ils attachent peu d’importance aux symboles, aux professions de foi, aux décrets et canons des conciles, aux bulles des papes et des patriarches : tout cela est impuissant à leurs yeux pour entretenir la perfection dans l’église et encore plus la sainteté dans l’âme. Il n’y avait pas, disent-ils, de législation dogmatique au temps des apôtres, et les fidèles n’en étaient pas moins religieux.

Les disciples d’Irving n’attachent d’importance qu’aux formes liturgiques, aux sacremens destinés à nourrir l’âme de pensées saintes et à rappeler au Chrétien sa mission ; tels sont la prière de tous les jours, l’office du matin et du soir, car ils se rendent deux fois par jour au temple, — le baptême et la communion. Sur ce dernier sacrement, ils se rapprochent beaucoup plus des catholiques que toutes les sectes protestantes. L’eucharistie a, disent-ils, un caractère double, quoique indivisible : c’est à la fois le sacrifice du corps et du sang du Christ et l’action de le recevoir comme nourriture, ils n’admettent cependant pas, dans l’acception véritable du mot, la présence réelle. Sans doute, les deux espèces deviennent réellement le corps et le sang du Sauveur, mais en tant qu’elles sont agréées comme sacrifice par Dieu, d’une manière supra-sensible. La substance matérielle du pain et du vin n’a pas disparu.

Les Irvingiens ont recruté et recrutent encore de nombreux partisans en Angleterre, en Écosse et en Allemagne. Ils en comptent aussi en Amérique, et ils ont aujourd’hui des missionnaires à Paris. Leurs assemblées religieuses