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emploient environ trois mille individus, dont le travail ressemble à celui des charbonniers de la Loire[1].

C’est pour le transport des minéraux et des métaux qu’ont été construits les chemins de fer du Gard ; mais ces voies de communication rendent en même temps d’immenses services à une industrie bien plus importante pour ces contrées que la métallurgie : je veux parler de la seconde branche de travail du groupe des Cévennes, — la production de la soie. Agricole dans son principe, parce qu’elle exige la culture du mûrier, dont les feuilles sont le seul aliment des vers à soie, l’industrie séricicole donne lieu, pour l’éducation même de ces précieux insectes, à un travail d’un genre spécial, qui devient tout à fait manufacturier aussitôt que l’éducation est finie.

On sait que les vers à soie, dont il a été compté jusqu’à trente familles, vivent à peine cinquante, jours, et que, durant cette courte existence, ils passent rapidement à travers les plus merveilleuses métamorphoses. L’insecte sort d’un œuf extrêmement petit, dont il brise la coquille quand vient la bonne température du printemps. L’éclosion des œufs, qu’on a soin d’exposer à un même degré de chaleur, afin d’obtenir des résultats simultanés, n’a guère lieu que le matin, de trois à neuf heures. Le ver se développe très rapidement, mais avec une organisation fort imparfaite, sans artères, sans veines, privé du sens de la vue, réclamant des soins constans et minutieux, de la part des mains qui l’élèvent, et n’ayant d’autre instinct que celui de reconnaître la feuille du mûrier et de distinguer les feuilles desséchées des feuilles nouvellement cueillies. Il change plusieurs fois de peau et de museau, ces renouvellemens périodiques, marqués par des signes singuliers et qu’on appelle mues, sont autant de crises très souvent mortelles. Les phénomènes se succèdent avec une rapidité croissante à mesure qu’approche le moment où l’appareil soyeux que le ver recèle dans ses flancs va distiller la matière gommeuse qu’il contient. La formation du cocon, qu’il est possible d’observer pendant un certain temps, jusqu’à ce que le rideau s’épaississe au point de cacher entièrement la chenille, prend à peu près quatre jours, qui sont pour l’insecte quatre jours d’un travail presque continu. Renversé sur le flanc, le ver déroule un fil d’une longueur de 800 à 150 à mètres, dont une partie seulement, les deux tiers environ, sont plus tard susceptibles d’être dévidés. Si l’existence de la chenille s’arrêtait au milieu de sa couche soyeuse, l’espèce serait

  1. La Grand’Combe avait fourni le premier exemple des fusions entre compagnies diverses, fusions qui viennent d’être assujetties par un décret à l’autorisation du gouvernement. Ces alliances peuvent sans doute avoir leurs dangers ; cependant, il est juste de le dire, elles ont donné le signal d’une très utile réforme dans l’exploitation des houillères en France.