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électrique était impossible ; mais ce qu’on ne sait pas aussi généralement, c’est que mon père avait pressenti l’application de l’électro-magnétisme à la transmission des signes télégraphiques assez longtemps avant que personne eût entrepris de réaliser celle admirable découverte, qui lui appartient aussi bien que l’idée de la navigation à vapeur appartient à Papin. M. Henry n’a jamais connu personnellement mon père et ne se doutait pas qu’il verrait son fils à Washington. Interpellé judiciairement dans l’affaire de M. Morse, après avoir mentionné les expériences faites par MM. OErsted, Arago et Davy, et la découverte sur laquelle mon père a fondé sa théorie de l’électricité dynamique, théorie aujourd’hui universellement adoptée, M. Henry a ajouté : « Ampère a déduit de cette théorie des résultats que l’expérience a depuis confirmés ; il a proposé à l’Académie des sciences de Paris un plan pour l’application de l’électro-magnétisme à la transmission des nouvelles à de grandes distances. Ainsi la découverte du télégraphe électrique a été faite par Ampère aussitôt qu’elle a été possible. »

Voici, en effet, ce qu’on lisait dans le premier mémoire de mon père sur l’action que les courans électriques exercent sur l’aiguille aimantée : « Autant d’aiguilles aimantées que de lettres qui seraient mises en mouvement par des conducteurs qu’on ferait communiquer successivement avec la pile, à l’aide de touches de clavier qu’on baisserait à volonté, pourraient donner lieu à une correspondance télégraphique qui franchirait toutes les distances et serait aussi prompte que l’écriture ou la parole pour transmettre la pensée. » Les procédés télégraphiques ont dû varier et se perfectionner ; mais il est impossible de méconnaître que la découverte du télégraphe électrique est là.

C’était sur une question de procédé que roulait le débat judiciaire où M. Morse était engagé. Dans l’histoire des travaux scientifiques dont le procédé de M. Morse n’est qu’une application, M. Henry a eu à parler de lui-même : il l’a fait avec une convenance et une sincérité parfaites ; mais il avait le droit de rappeler que des expériences faites en Amérique ayant donné lieu de penser que la force électro-magnétique s’affaiblissait rapidement en proportion des distances, c’était lui qui avait montré qu’on pouvait remédier à cet inconvénient bien avant les tentatives d’application de M. Morse, qui, sans ses perfectionnemens, n’auraient pas été praticables.

L’établissement connu sous le nom de Patent-Office (bureau des brevets d’invention) se compose de deux parties. Dans l’une sont des modèles de toutes les machines qui ont obtenu des brevets d’invention. À ces modèles correspond une description manuscrite de la machine, accompagnée de dessins. La description et les dessins sont mis à la disposition de ceux qui veulent les étudier. Dans une