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ligne de New-York à Liverpool, et ils seront probablement entraînés un jour ou l’autre à établir, comme leurs rivaux, des départs hebdomadaires. Nous pourrions cependant, pour le début, nous en tenir à une correspondance bimensuelle, et, dans ce cas, il faudrait employer 5 steamers, soit 4 pour le service régulier et 1 de réserve.

Les paquebots anglais qui sont chargés de la ligne des Antilles et du golfe du Mexique partent de Southampton deux fois par mois ; ils se rendent à Saint-Thomas, d’où rayonnent six embranchemens qui desservent toutes les colonies anglaises et étrangères, et qui aboutissent à Chagres, Vera-Cruz, la Havane, Demerara, la Trinité et Nassau. Les paquebots français devront fournir le même nombre de départs ; mais leur parcours sera beaucoup moins compliqué, attendu que nos intérêts coloniaux dans la mer des Antilles n’exigeront pas autant d’escales, et qu’il suffira de rattacher à la ligne principale, aboutissant à la Martinique, deux embranchemens qui se dirigeront, l’un vers le Mexique, l’autre vers Chagres. Ce service emploierait douze navires ainsi répartis : 5 sur la ligne principale et 7 sur les deux embranchemens.

Les départs des paquebots anglais à destination du Brésil n’ont lieu qu’une fois par mois. L’établissement d’un pareil service exigerait en France l’emploi de 3 steamers, auxquels s’ajouteraient deux autres navires pour l’embranchement de la Plata. Peut-être les conditions particulières de notre commerce avec le Brésil, Montevideo et Buénos-Ayres permettraient-elles d’effectuer avec profit deux voyages par mois. Cette hypothèse sera examinée en son lieu.

En résumé, le nombre des navires strictement nécessaires pour le service des communications transatlantiques sur les trois lignes des États-Unis, du golfe du Mexique et du Brésil, y compris les embranchemens, serait de 22 ; c’est toute une flotte à construire et à équiper dans le plus bref délai.

Ici se présentent plusieurs questions techniques qui sont encore aujourd’hui très controversées. Les navires affectés à la navigation transatlantique seront-ils construits en fer ou en bois ? Seront-ils mus par les roues à aubes ou par l’hélice ? Quelle sera leur force en chevaux de vapeur ? Quel sera leur tonnage ? — Au premier abord, on serait assez disposé à penser que la solution de ces différens points, en ce qui concerne chaque ligne, pourrait être laissée à l’appréciation de la compagnie concessionnaire, qui sera naturellement très intéressée à adopter les combinaisons les plus avantageuses pour opérer des transports économiques et rapides. Cependant il ne faut pas perdre de vue que le service des paquebots, tel qu’on veut l’établir, offre tous les caractères d’une entreprise nationale, qu’il sera largement subventionné par le trésor, et que dès lors l’état possède le droit incontestable d’intervenir dans les détails qui se rattachent à la construction et à l’armement des navires. Comment d’ailleurs parviendrait-on à fixer équitablement le taux de la subvention, si chaque contrat ne contient pas sur les principaux chapitres de dépenses des règles précises auxquelles la compagnie concessionnaire sera obligée de se conformer ? Les prix d’un navire en fer et d’un navire en bois, d’une machine à roues et d’un propulseur à hélice ne sont pas les mêmes : le chiffre de la subvention sera donc plus ou moins élevé selon que le gouvernement imposera, par le cahier des charges, des conditions plus ou moins coûteuses, et ce sont ces conditions qu’il importe d’abord de stipuler.