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Dans la ville de New-York, les écoles ont considérablement augmenté relativement à la population. Celle-ci était, en 1831, d’environ 170,000 âmes, maintenant elle dépasse 500,000, elle a plus que triplé ; mais le nombre des enfans instruits, qui est aujourd’hui de 120,000, a quintuplé. Le personnel des instituteurs est de plus de 12,000. En 1852, seulement pour les écoles du soir, on a dépensé une somme de 80,000 francs. Les écoles de l’état de New-York se distinguent aussi de celles de plusieurs autres états en ce qu’il n’y a pas d’écoles pour les enfans pauvres. Nulle distinction n’existe entre ceux-ci et les enfans riches. L’impôt qu’on prélèverait sur les parais aisés au profit des petits indigens, ils le paient pour l’école, dont ces derniers profitent avec leurs propres enfans. Le déboursé est le même, et la dignité de tous est mieux respectée. Il s’est fait depuis une douzaine d’années une révolution dans l’organisation des écoles à New-York, et M. Hughes, archevêque catholique de cette ville, car les Américains ne sont pas si chatouilleux à l’endroit du papisme que les Anglais, a amené ce changement. Il existait une ancienne corporation qui était en possession de créer et de gouverner les écoles. Cette corporation, dans laquelle se trouvait un certain nombre de quakers, laissait l’enseignement religieux à la famille et aux écoles du dimanche, seulement on lisait dans l’école la Bible sans commentaires ; mais comme c’était une bible protestante, les catholiques avaient des scrupules : ils demandèrent qu’une partie du fonds des écoles leur fût attribuée. L’archevêque plaida cette cause avec beaucoup d’éloquence. Par respect pour le principe de ne rien faire qui favorise une communion chrétienne en particulier, principe qui est très dominant dans la république, l’état de New-York n’a pas cru pouvoir affecter aux églises catholiques une portion du fonds commun. Néanmoins, tout en respectant le droit de l’ancienne corporation à laquelle on a laissé le gouvernement de ses écoles, l’état en a créé de nouvelles gouvernées par des préposés (trustees) qui sont nommés par des hommes choisis dans chaque division de la ville, et on a formé un collège pour l’enseignement supérieur gratuit sous le nom de Collège libre (Free Academy).

Ce collège ne s’est pas établi sans difficulté. Ici tout se discute au point de vue politique ; les uns approuvaient, comme très conforme à l’esprit républicain, que des enfans placés dans les situations les plus diverses fussent ainsi admis à suivre un enseignement supérieur par le seul droit de la capacité. Les autres, dans l’excès de leurs susceptibilités démocratiques, s’élevaient contre un enseignement supérieur donné gratuitement, comme créant dans la jeunesse une sorte d’aristocratie au profit de laquelle seraient détournés l’argent et les maîtres, au détriment des écoles primaires, utiles à tous. Il a fallu l’autorisation