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de tous les faits propres à affriander les lecteurs. On devait être naturellement conduit à réunir plusieurs événemens sur la même feuille ou dans le même cahier, et le jour où l’industrie d’un homme, encouragée par la curiosité croissante du public, donnerait un titre uniforme à ces feuilles volantes, établirait entre elles un ordre de succession, et leur assignerait un retour périodique, la gazette, le journal seraient créés.


I.

Si l’on s’attache à la question de priorité, les dates semblent être en faveur de la Hollande et de l’Angleterre. De très bonne heure, dès les dernières années d’Elisabeth et les premières de Jacques Ier, on trouve en Angleterre un grand nombre de feuilles volantes et de placards, intitulés News (nouvelles) et contenant le récit d’événemens qui s’étaient accomplis en Angleterre ou sur le continent. Dans ce dernier cas, le titre indique presque toujours que les nouvelles offertes au public sont traduites de l’original hollandais, et ce soin, de la part des éditeurs anglais, suffirait seul à décider à l’avantage de la Hollande la question de priorité. Si l’on songe aux rapports journaliers qui existaient alors entre l’Angleterre et la Hollande, à l’étroite alliance qui unissait les deux peuples depuis que les Pays-Bas s’étaient soulevés contre Philippe II, on ne sera pas surpris de voir un usage hollandais passer en Angleterre. A partir de 1619, un imprimeur du nom de Nathaniel Newberry fit paraître fréquemment des relations des pays étrangers sous le titre uniforme de News; la périodicité manquait seule à ces publications pour en faire des gazettes. Trois ans plus tard, ce progrès fut accompli : le 23 mai 1622, Nicholas Bourne et Thomas Archer mirent en vente une feuille intitulée les Nouvelles hebdomadaires (the Weekly News). Le titre complet était : les Nouvelles hebdomadaires d’Italie, d’Allemagne, de Hongrie, de Bohême, etc.; c’était un sommaire plus encore qu’un titre. Le second numéro, celui du 30 mai, et plusieurs des suivans portent la mention ordinaire, traduit de l’original hollandais, qui constate l’emprunt fait au pays voisin. Les numéros semblent s’être suivis régulièrement; mais si le nom de l’imprimeur ne change pas, celui des éditeurs change presque avec chaque numéro : c’est tantôt Nicholas Bourne et Thomas Archer, tantôt Nathaniel Newberry et William Sheffard. Il semble que plusieurs éditeurs se soient entendus pour faire, chacun à son tour, les frais de cette publication. Le 25 septembre 1622 paraît enfin le nom de Nathaniel Butter. Celui-ci était un ancien papetier dont les affaires avaient mal tourné, et qui, pour vivre, s’était mis à faire des brochures et à compiler des nouvelles. Ses premiers écrits remontent à l’année 1611. Peu à peu il