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disposé l’artiste bâlois à accepter les offres du comte d’Arundel, qu’il avait suivi à Londres en 1526. On peut le considérer comme le premier peintre de marque qui soit venu en Angleterre. Après lui, une série d’artistes étrangers furent comme à la solde des souverains qui précédèrent George Ier. En dépit des préventions dont l’Angleterre était l’objet parmi les princes et les peintres du continent, en dépit des anathèmes de Rome qui désignaient tout contact avec elle comme dangereux pour l’ame et le corps, More, Zucchero, de Heere, Mytens. Rubens et Van-Dyke s’aventurèrent tour à tour sur cette terre d’hérésie.

More (Antonio Moro), qui était natif d’Utrecht, fut le premier peintre de la cour sous le règne de Marie. L’Italien Zucchero et le Gantois Lucas de Heere peignirent sous Elisabeth plusieurs portraits, entre autres celui de la reine, qui, du reste, n’entendait rien à l’art et le goûtait peu. Jacques, son successeur, le sentait au contraire et l’encouragea. Ce fut lui qui pensionna Mytens de la Haye. Vers le temps où Charles Ier parvint au trône, la rigidité primitive du sentiment protestant s’était déjà beaucoup relâchée : on commençait à regarder avec moins d’horreur les tableaux d’autel, les sujets de sainteté, et le roi, qui avait du goût et de la munificence, se plut à rassembler des œuvres d’art dans ses résidences. Ce n’est pas à lui, disons-le néanmoins, que revient le mérite d’avoir commencé la collection royale. Henri VIII en avait eu la première idée, et il avait même réuni jusqu’à cent cinquante tableaux, nombre déjà considérable, si l’on se rappelle le triste état du goût public et la vie si agitée du monarque, avec ses représentations d’apparat, ses querelles religieuses et ses tragédies domestiques. De son côté, Charles Ier développa ce que Henri VIII avait commencé. Il acquit les cartons de Raphaël ; il acheta la collection du duc de Mantoue, et la grande galerie de son palais de Whitehall, où il établit son musée, ne compta pas moins de quatre cent soixante peintures par trente-sept maîtres différens. Parmi ces œuvres figuraient des Parmesan, des Raphaël, des Titien, des Léonard de Vinci. De plus, Rubens étant venu à Londres comme ambassadeur de l’infante d’Espagne, le roi l’engagea à peindre un plafond de son palais, et l’artiste, dont le séjour se prolongea pendant une année, laissa derrière lui une brillante allégorie, outre plusieurs portraits.

Au maître succéda son élève, Van-Dyke. Hautement en faveur près de Charles, il demeura huit ans à Londres, où il mourut en 1641, et il sema dans le pays un grand nombre de portraits, ceux de la famille royale et des principaux personnages de l’époque. À peu près vers le même temps, un disciple de l’école hollandaise, Lely, peignait en Angleterre le paysage ; mais bientôt il y renonça pour s’adonner au portrait, comme plus lucratif. C’était un homme fort habile : il devint le peintre ordinaire de Charles II et mourut en 1680. Enfin, et pour clore