Page:Revue des Deux Mondes - 1852 - tome 15.djvu/842

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

considérée. Soutenu seulement par des contributions volontaires, le culte languit et végète partout où l’indigence des fidèles les empêche d’assurer l’existence de ses ministres, et les consolations de la religion peuvent manquer à ceux à qui elles seraient le plus nécessaires. Entretenu par l’état, le culte obtient partout la même assistance ; ses bienfaits sont indistinctement répandus sur le pauvre et sur le riche. Ainsi à la contribution volontaire s’attache le privilège, et au salaire public l’égalité. Ce sont les raisons qui ont fait souvent demander la suppression du casuel que l’église catholique reçoit outre le salaire public ; ce sont les raisons qui, lors de la négociation du concordat, engagèrent le saint-siège à insister avec une force particulière pour que le clergé catholique reçût un traitement de l’état.

Rémunéré par le trésor, le culte prend place parmi les services publics. En est-il dégradé ? Les services publics comprennent tous les besoins sociaux, les plus nobles comme les plus obscurs, la justice, l’instruction publique, les sciences, les lettres, les arts, tout ce qui touche à la vie morale de la nation comme à sa vie matérielle. Les cultes peuvent y entrer sans déshonneur. Quel besoin social plus digne de la protection de l’état et du secours des contributions publiques ? Aucune croyance, si timorée qu’elle soit ; ne peut s’en alarmer. Le contribuable prend part aux dépenses de l’état comme membre du corps social, et non en considération de son intérêt personnel à telle ou telle dépense, ou de la sympathie qu’elle lui inspire. L’habitant des montagnes subvient à l’agrandissement des ports, le marin à la construction des chemins de fer, le laboureur à l’entretien des corps savans, des musées, des bibliothèques, le savant aux écoles du peuple ; le prêtre entre pour sa part dans les allocations accordées aux théâtres. Payer son contingent de l’impôt n’est pas faire acte d’adhésion ou de foi aux mille emplois qu’il reçoit. Le budget est une vaste souscription nationale où les préférences, les goûts, les prédilections individuelles s’effacent devant les satisfactions et les nécessités générales.

Il est vrai encore que le budget serait diminué de la somme affectée aux cultes, si cette dépense était laissée à la charge personnelle de ceux qui consentiraient à la supporter ; mais quelle serait la conséquence de cette réduction ? Ou la dépense cesserait en réalité de se faire, et dans ce cas les ministres du culte, privés de moyens d’existence, seraient condamnés à la misère et les autels exposés à l’abandon ; ou la dépense se ferait encore, et dans ce cas les contribuables ne seraient point soulagés ; seulement la répartition serait moins égale et plus arbitraire. L’économie ne serait donc pas obtenue, ou bien elle s’opérerait aux dépens des ministres du culte.

On invoque l’exemple des États-Unis d’Amérique. Là, dit-on, chaque citoyen contribue comme il lui plaît aux dépenses de son culte et à