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DU


MOUVEMENT INTELLECTUEL


PARMI LES POPULATIONS OUVRIERES.





LES OUVRIERS DE LYON[1]




Les ouvriers de Lyon sont entourés, depuis une vingtaine d’années, d’un grand et sinistre éclat. Combien de fois, durant de longues journées d’angoisses, l’attention de la France n’a-t-elle pas été suspendue sur l’ancienne métropole des Gaules, où des masses égarées agitaient le drapeau de la guerre sociale ! Même dans les intervalles de tranquillité, les regards s’attachaient encore sur cet Etna mal éteint, d’où l’on craignait de voir soudainement sortir des explosions nouvelles. Cependant les ouvriers de la fabrique lyonnaise sont très imparfaitement connus. Avec l’organisation singulière de l’industrie de Lyon, qui tient habituellement murée dans la famille l’activité individuelle, il est difficile de pénétrer dans la vie morale et intellectuelle des masses. De plus, on ne s’est guère enquis des ouvriers lyonnais que dans des jours de crise, alors que les lignes les plus caractéristiques des physionomies disparaissent au milieu de mouvemens convulsifs et passagers. Il y a aujourd’hui un temps d’arrêt très marqué dans les rangs de cette turbulente population. On n’est plus haletant sur une brèche ouverte, on respire avec plus de liberté : le moment est favorable pour fixer les traits essentiels de ce vivant tableau.

  1. Voir les livraisons des 1er juin, 1er septembre, 15 novembre 1851, 15 février 1852.