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principal est de nécessité première dans la confection de tous les tissus manufacturés.

La colonie du Sénégal et dépendances se compose plutôt de points commerciaux et maritimes clair-semés sur une vaste étendue du territoire de l’Afrique que du territoire même, et en effet à une colonie d’échanges ce qu’il faut d’abord, c’est un très grand nombre de marchés d’échange qui lui permettent de multiplier ses transactions commerciales dans l’intérieur et sur le littoral. Saint-Louis est le chef-lieu et le plus important de ces points ; il est situé à l’embouchure même du fleuve le Sénégal, cette grande artère de l’Afrique qui promène nos bateaux troqueurs jusqu’à 200 lieues dans le cœur de ce mystérieux continent ; sur ses rives sont situés les fortins de Dagana, Richard-Toll, Mérina-Ghène, Bakel, Senoudébou, autant de points d’appui militaires et commerciaux pour nos opérations sur le fleuve.

Les dépendances extérieures du Sénégal sont échelonnées dans le sud de ce fleuve, sur près de 800 lieues de côtes : ce sont d’abord Gorée, îlot escarpé, jeté en pleine mer devant le Cap-Vert, et que l’amiral Duperré avait l’habitude d’appeler la clé de la côte occidentale d’Afrique. Il faut y joindre le petit comptoir d’Albréda, enclavé dans le fleuve anglais de Gambie, lequel a été si souvent précurseur d’orages politiques, et le sera sans doute encore par suite de sa position ambiguë. Parmi ces dépendances, on compte aussi le fort de Sedhiou, dans la Casamance, situé à une soixantaine de lieues au sud de Gorée ; les comptoirs du Grand-Bassam et d’Assim, sur la côte d’Or, 300 lieues plus au sud encore, et enfin le comptoir du Gabon, éloigné de SaintLouis de près de 800 lieues.

C’est une erreur assez généralement répandue en France que de confondre le Sénégal avec ses dépendances. On voit quelles immenses distances les séparent ; les différences du climat, du sol, des provinces, des populations, des mœurs, les séparent davantage encore. Tandis qu’au Sénégal on éprouve pendant huit mois de l’année une brûlante sécheresse accompagnée de vents d’est, qui font transsuder la gomme à l’acacia du désert, dans le fond du golfe de Guinée au contraire, près du Gabon, ce sont des pluies torrentielles de neuf mois, des tornades et des vents de sud-ouest qui fécondent la puissante végétation des palmiers, dont les noix sont si riches en substance oléagineuse. Quant aux variétés qu’on remarque dans les peuplades diverses qui bordent cette immense étendue de côtes, elles échappent à toute énumération. La population française qui habite les possessions que la France a ainsi échelonnées dans l’Afrique occidentale monte à 18,000 noirs ou Africains de race mélangée et à 250 Européens ; mais l’influence de notre pavillon s’exerce sur un chiffre bien autrement considérable d’Africains, chiffre qu’on peut évaluer à 800,000 environ sur les bords