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M. Gaëtano Moro, à la suite de la reconnaissance de l’isthme, fit un devis approximatif des frais d’établissement d’un canal maritime commençant au confluent du Malatengo pour aboutir aux lagunes qui se trouvent près de Tehuantepec. Ce devis s’élève à 85 millions de francs, y compris divers travaux accessoires ; mais cette évaluation est probablement trop faible. Quoi qu’il en soit, ces études ne furent suivies d’aucun résultat. Un peu plus tard, en 1846, M. de Garay obtint du général de Salas, alors président du Mexique, une confirmation de son privilège et un nouveau délai de deux ans pour commencer les travaux. Le Mexique était alors en guerre avec les États-Unis, et l’une des conditions de la paix conclue l’année suivante fut la cession de la Californie au gouvernement américain. Par ce fait seul, le passage à travers l’isthme de Tehuantepec acquérait une grande importance. Bientôt après, lorsque arrivèrent les merveilleuses découvertes des richesses minérales de la Californie, cette importance s’accrut encore. Le passage à travers le pays de Tehuantepec est bien plus rapproché de l’Eldorado que les voies de Panama et de Nicaragua. Ainsi, de l’embouchure du Mississipi à San-Francisco, on a calculé que la distance, en passant par Tehuantepec, était de 3,850 milles anglais, tandis que ; par l’isthme de Panama, cette distance est de 5,675 milles ; c’est donc une différence de 1,825 milles (2,920 kilomètres) en faveur de Tehuantepec. De New-York à San-Francisco, la distance par la voie de Panama est de 6,650 milles, et par Tehuantepec de 5,251 seulement, c’est-à-dire 1,400 milles (2,240 kilomètres) de moins. Il y a donc là, en faveur de l’isthme de Tehuantepec, un avantage incontestable, et nul peuple n’apprécie un avantage de cette nature au même degré que les Américains, qui sont toujours dévorés du désir d’aller vite. « S’il y avait deux routes conduisant en enfer, disent-ils, nous prendrions la plus courte et la plus rapide. » Aussi, lors du traité de paix qui fut conclu entre les deux républiques du Mexique et des États-Unis, le gouvernement de l’Union s’empressa-t-il de demander le droit de passage à travers l’isthme, et les droits des concessionnaires de la voie de communication qu’il était question d’y établir furent alors reconnus de nouveau par le gouvernement mexicain. À cette époque, M. de Garay venait de céder son privilège à une compagnie dont le principal personnage était un négociant de New-York. Un peu plus tard, en 1850, des citoyens de la Nouvelle-Orléans conçurent l’idée d’obtenir le privilège des concessionnaires actuels. Aucune ville de l’Union n’est effectivement aussi intéressée au succès de l’entreprise de Tehuantepec que la Nouvelle-Orléans. Le trajet de cette ville à l’embouchure du Guazacoalcos peut s’effectuer facilement en quatre ou cinq jours au plus, la distance n’étant guère que de 900 milles (1,440 kilomètres). De Tehuantepec ou d’un point voisin sur le Pacifique à San-Francisco, il y a