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à travers la contrée que le canal doit traverser ; comme complément indispensable de ce service, deux lignes de navires à vapeur partant, l’une de New-York, l’autre de San-Francisco, aboutissent d’un côté à San-Juan de Nicaragua sur l’Atlantique, de l’autre sur le Pacifique, à San-Juan del Sur.

Le trajet sur le fleuve San-Juan se fait au moyen de petits bâtimens à vapeur construits aux États-Unis et d’un très faible tirant d’eau. Ces bateaux sont parvenus, après bien des difficultés et même des accidens, à franchir les rapides qui existent sur le cours du San-Juan, à l’exception toutefois de ceux de Castillo-Viejo, où l’on est obligé d’exécuter ce qu’on appelle, dans l’Amérique du Nord, un portage ; on débarque les voyageurs et les marchandises, et l’on suit l’une des rives du fleuve jusqu’au-delà des rapides. On trouve alors un autre bateau à vapeur pour reprendre la voie navigable. Dans le portage proprement dit, on transportait d’un côté à l’autre des rapides l’embarcation elle-même ; ce mot est d’origine française, car c’est une opération que faisaient tous les jours, sur les fleuves de l’Amérique du Nord où les rapides ne manquent pas, les fondateurs de tant d’établissemens qui devaient tous, jusqu’au dernier, nous échapper un jour.

L’on traverse le lac de Nicaragua depuis l’origine du San-Juan jusqu’à une petite baie située sur le bord occidental du lac, et que les Américains désignent sous le nom de Virgin-Bay (baie de la Vierge). De là au port de San-Juan del Sur la distance n’est que de 12 milles (19 kilomètres) ; on fait ce trajet à dos de mulets par un sentier étroit. On ne compte pas s’en tenir là : un traité a été conclu aux États-Unis avec un entrepreneur qui doit construire entre Virgin-Bay et le Pacifique une route carrossable. On comptait, il y a deux mois, sur le fleuve San-Juan et sur le lac, cinq bateaux à vapeur affectés au service du transit.

Du côté de l’Atlantique, la ligne de navires à vapeur qui met cette voie de transit en communication directe avec New-York se compose de deux bâtimens, le Daniel Webster et le Prometheus, qui partent de chaque point tous les quinze jours. Ils vont généralement toucher à Chagres, qui n’est qu’à 240 milles de San-Juan ou Grey-Town, pour prendre ou déposer les voyageurs qui, pour traverser l’isthme, préfèrent suivre la route de Chagres à Panama. Sur le Pacifique, il y a trois navires à vapeur : le North-America, le Pacific et l’Independence. Les départs ont lieu aussi deux fois par mois. Le North-America vient de faire naufrage près d’Acapulco ; mais il sera sans doute bientôt remplacé. Ces deux lignes font déjà concurrence à celles qui aboutissent à Chagres et à Panama. Dans l’état actuel des communications, le trajet de New-York à San-Francisco, en passant par le pays de Nicaragua, dure à peu près trois jours de moins que par la voie de Chagres et de