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Du côté de l’ouest, la bande de terrain comprise entre le lac et l’Océan Pacifique se réduit à une largeur de 12 à 15 milles. Au nord-ouest, on rencontre un second lac plus petit, le lac de Léon ou de Managua, qui communique avec le premier par la rivière Tipitapa, et qui n’est éloigné de l’Océan Pacifique que de 9 à 10 milles.

Cette contrée paraît, par sa configuration même, très propre à l’établissement d’une voie navigable qui serait la véritable jonction des deux océans. Des travaux publiés il y a quelques années[1] ont constaté le résultat des études faites jusqu’alors pour arriver à la connaissance des difficultés qu’on aurait à rencontrer dans une entreprise aussi considérable. Parmi ces recherches, les plus dignes d’intérêt sont celles de M. Bailey, officier de la marine anglaise, qui fut chargé, en 1837, par le gouvernement de l’Amérique centrale, d’étudier le terrain que devait traverser le canal, et en particulier la zone comprise entre le lac de Nicaragua et le Pacifique.

D’après M. Bailey, le fleuve San-Juan a 79 milles nautiques (146 kilomètres) de long ; la profondeur varie de 2 à 15 mètres. La pente totale entre le lac de Nicaragua et l’Océan Atlantique est de 45 mètres ; mais il ne s’agit pas ici d’une pente uniforme ou à peu près : celle du fleuve San-Juan se trouve accumulée en grande partie en quatre endroits où sont des rapides qui permettent cependant de naviguer avec des pirogues dont le tirant d’eau ne dépasse pas 1 mètre 20. À 15 milles de l’embouchure du San-Juan, se trouve un autre cours d’eau, le Colorado, qui n’existe, comme on sait, que depuis la fin du XVIIe siècle, et qui s’est ouvert par suite des obstacles placés dans le lit du San-Juan, lorsque les Espagnols voulurent ainsi mettre un terme aux déprédations des flibustiers dans la vallée voisine du fleuve. À l’embouchure du San-Juan, on trouve une barre au-dessus de laquelle il y a au moins 3 mètres 50 d’eau. Il faudrait donc, pour améliorer le cours du San-Juan de manière à le rendre navigable pour des navires de 1,200 à 1,500 tonneaux, qui jaugent 5 mètres 50 à peu près, établir dans le lit du fleuve un grand nombre de barrages ou même construire un canal latéral, ainsi que l’a proposé M. Bailey. Cet officier pensait que, pour de semblables travaux de canalisation, la dépense s’élèverait de 10 à 12 millions de dollars.

Le port de San-Juan ou de Grey-Town, quoique d’une faible étendue, est considéré comme très bon par M. Bailey ; c’est aussi l’opinion d’un voyageur américain, M. Stephens, et des officiers de la marine française qui ont visité ces parages. Au point de vue du climat, il présente des inconvéniens de même nature, mais à un degré moindre que

  1. On peut voir la relation du voyage de m. Stephens dans l’Amérique centrale et te travail publié par M. Michel Chevalier sur l’isthme de panama dans la Revue du 1er janvier 1844.