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commencés simultanément sur l’île de Manzanilla et en face du village de Gatun. On avait établi préalablement en cet endroit un chantier à peu près semblable à celui de l’île de Manzanilla, c’est-à-dire composé de quelques bâtimens en bois pour les logemens, les bureaux, une infirmerie, etc. Presque immédiatement après, d’autres chantiers furent établis dans la vallée du Chagres, à Bojeo-Soldado, à Frigole et ailleurs encore. On voulait ainsi profiter de la saison sèche, qui venait de commencer. Pour accélérer encore les travaux, on eut recours à un expédient qui a été employé ailleurs dans plusieurs circonstances : on résolut de remplacer provisoirement les remblais par des pilotis sur tous les points où la formation de ces remblais aurait exigé des transports de terre à de grandes distances, et aussi dans les vallées tant soit peu profondes. On employa également les pilotis pour la traversée des cours d’eau, ce qui permettait d’ajourner la construction des maçonneries des ponts et viaducs. Les pilotis ont été encore substitués aux remblais sur le sol marécageux de l’île de Manzanilla et les terrains humides que le chemin de fer traverse ensuite sur une longueur de 4 à 5 milles. Il est probable que, sur la première section du chemin comprise entre la baie de Limon et Gorgona, et qui a 26 milles (42 kilomètres) de long, il y aura ainsi 8 à 9 milles (14 kilomètres) de voie établie sur pilotis. Il est bien entendu que ces pieux devront être prochainement recouverts par des remblais ; dans ces contrées, les bois ne pourraient pas résister long-temps à l’action alternative du soleil et de l’humidité ; ils seraient d’ailleurs rongés par les insectes qui fourmillent sur l’isthme.

En même temps qu’on s’occupait de la voie principale qui traverse l’île de Manzanilla en son milieu, on procédait, sur le bord occidental de l’île, à la mise en place d’une série de pieux destinés à servir de supports à des voies de fer parallèles à la voie principale et qui vont la rejoindre au sud de l’île. Ces voies traversent une petite anse en forme de.demi-cercle qui existe en cet endroit, et où les navires d’un faible tonnage peuvent arriver, de manière à prendre position à côté des rails et y opérer leur chargement et leur déchargement. Une autre voie, placée au nord des premières, s’avance en retour d’équerre dans la baie jusqu’à la distance où les grands navires peuvent venir mouiller, c’est-à-dire jusqu’à 120 mètres à peu près. Ces voies formeront la gare des marchandises du chemin de fer ; la gare des voyageurs sera nu centre de l’île, sur la ligne principale. Il a fallu, pour les voies qui traversent ainsi la petite anse formée par la configuration des bords de l’île, employer des pieux de très fortes dimensions, et l’opération de la mise en place de ces pieux a été l’une des plus difficiles auxquelles ait donné lieu la construction du chemin de fer.

La compagnie concessionnaire du chemin de fer de Panama se propose de construire une ville sur l’île de Manzanilla ; cette ville sera