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mêmes habitudes. Il y a près du village quelques pièces de terre en culture où l’on récolte un peu de maïs et de légumes.

En quittant Gatun, on trouve sur la rive droite la rivière de ce nom, qui se jette dans le Chagres, dont la largeur, à partir de ce point, se maintient pendant long-temps à 70 ou 80 mètres ; on aperçoit sur la rive gauche le cerro de Gatun ; on passe successivement devant les petits hameaux de Miraflores, de la Braja et de Dos-Hermanos, tous sur la rive droite. On fait souvent halte pour la nuit à ce dernier endroit, où se trouve un de ces hôtels américains malheureusement si nombreux sur l’isthme, et sur la porte desquels on devrait écrire, à l’imitation de Dante : « Vous qui entrez ici, laissez à la porte toute idée de bien-être, de tranquillité, de propreté et de décence ; laissez-y encore l’espoir de trouver chez votre hôte non pas du respect, mais quelque chose qui ressemble à de la politesse. » L’hôtel de Dos-Hermanos, parmi tous ces bouges hideux, mérite une mention spéciale : c’est un de ces endroits auxquels les touristes anglais consacrent plusieurs pages de malédictions dans leurs relations de voyage.

En face de Dos-Hermanos, le Chagres reçoit les eaux du Rio-Trinidad. À 3 milles en amont, on passe devant le hameau de Vamos-Vamas, situé sur une portion de terrain plus découverte que le reste du parcours. À partir de Vamos-Vamas, il y a dans le lit du Chagres un assez grand nombre d’arbres de dérive, qui sont parfois la cause d’accidens graves. Ces arbres sont fixés par le bas dans le lit de la rivière et placés obliquement, de manière à présenter généralement leur extrémité supérieure du côté d’aval. À certaines époques de l’année, cette extrémité est recouverte d’eau, mais assez près de la surface pour que les barques viennent s’y heurter, et il arrive quelquefois qu’elles sont traversées de part en part et submergées sur-le-champ. Un peu au-delà de Vamos-Vamas et toujours sur la rive droite sont les hameaux de Pena-Blanca et de Rojeo-Soldado ; puis, à quelques milles plus loin, sur la rive gauche, celui de Palenquilla, où les voyageurs qui remontent le Chagres font généralement halte pendant la nuit. À partir de Palenquilla, le courant du Chagres devient plus rapide, et les arbres de dérive se multiplient au point de former quelquefois, au travers du lit de la rivière, de véritables barrages. Il y a là aussi des hauts fonds qui rendent, la navigation très pénible pendant que les eaux sont basses. Dans l’état actuel des choses, il faut sept à huit heures pour remonter de Palenquilla à Gorgona, c’est-à-dire pour un trajet de 8 à 9 milles.

C’est, comme on le sait, à Gorgona que l’on quitte le Chagres pour prendre la voie de terre jusqu’à Panama pendant la saison sèche. Dans la saison des pluies, le sentier qui conduit de Gorgona à Panama devient impraticable, et l’on est obligé de remonter la rivière jusqu’à