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en définitive, ne put arriver à commencer les travaux. D’après les études de M. Garella, la dépense à faire pour l’établissement d’un canal maritime capable de livrer passage aux navires de 1,200 tonneaux devait s’élever à 125 millions au moins.

Dans le courant du mois de mai 1847, une compagnie européenne, qui s’était organisée à Paris même, obtint du gouvernement de la Nouvelle-Grenade un traité qui lui accordait le privilège exclusif de construire non pas un canal, mais un chemin de fer à travers l’isthme. Le traité fut ratifié le 8 juin suivant par la législature du pays ; mais cette fois encore ces préliminaires n’aboutirent à aucun résultat. La compagnie concessionnaire devait, aux termes de son traité, verser dans le délai d’un an, à partir de la ratification de ce traité, une somme de 600,000 francs à titre de cautionnement, sous peine de perdre son privilège. Cette condition n’ayant pas été remplie, la concession fut déclarée nulle par le gouvernement de la Nouvelle-Grenade.

On était alors au milieu de l’année 1848. Précisément à cette époque, le mouvement d’émigration vers la Californie commençait à prendre son essor ; on venait de découvrir les premières mines du nouvel Eldorado. Quelques citoyens considérables de New-York, qui faisaient un grand commerce avec les ports du Pacifique, avaient, dès l’année précédente, par une sorte de pressentiment des découvertes qui allaient s’accomplir, conçu le projet de s’occuper de la construction d’un chemin de fer à travers l’isthme. Ils saisirent l’occasion qui se présentait de faire des propositions au gouvernement de la Nouvelle-Grenade, et, avec l’esprit pratique qui distingue éminemment les Américains du Nord, ils prirent immédiatement les mesures nécessaires pour fournir le cautionnement de 600,000 francs que la compagnie européenne n’avait pu verser en temps utile. Ils parvinrent ainsi, au mois de décembre 1848, à conclure avec le chargé d’affaires de la Nouvelle-Grenade aux États-Unis un traité qui leur conférait les privilèges accordés précédemment à la compagnie qui venait d’encourir la déchéance, avec cette différence essentielle toutefois que la durée de la concession était réduite à quarante-neuf ans, tandis que dans le premier traité elle était de quatre-vingt-dix-neuf. Plus tard, en 1850, après que les nouveaux concessionnaires eurent organisé à New-York une compagnie chargée de conduire toutes les opérations de l’entreprise, quelques modifications furent introduites à l’acte de concession par suite d’un traité conclu à Bogota entre M. John L. Stephens, président de la compagnie, et le ministre des affaires étrangères de la Nouvelle-Grenade. Ce traité, signé le 16 avril 1850, fut ratifié par le congrès de cette république le 4 juin suivant. Il suffit, pour en apprécier l’esprit, d’en connaître les principales dispositions. — Six ans sont accordés à la compagnie pour la construction du chemin de fer ; ce délai pourra