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Et remarquez que je ne parle pas ici de bien d’autres religieuses du plus haut rang et du plus aimable caractère qui étaient au couvent de la rue Saint-Jacques dans la jeunesse de Mme de Longueville : Mlle Marie d’Hannivel, sœur Marie de la Trinité ; Mme La Rochefoucauld de Chandenier, sœur Marie de Saint-Joseph ; Mlle Le Bouthillier, sœur Philippe-de-Saint-Paul ; Mlle de Machault, sœur Marie de la Passion ; Mlle de Thou, sœur Angélique de la Passion ; Mlle d’Anglure de Bourlemont, sœur Geneviève des Anges ; Mlle d’Argouges, sœur Élisabeth de Saint-Joseph ; Mme de Brienne, la mère Anne de Saint-Joseph ; la comtesse de Bury, restée veuve à dix-neuf ans, sœur Madeleine de Jésus ; Mlle de Remenecourt, la mère Thérèse de Jésus ; Mlle de Lenoncourt, la mère Charlotte de Jésus ; Mlle de Fieubet, Mlle de Marillac, et un peu plus tard des noms plus illustres encore, des cœurs encore plus près de celui de Mlle de Bourbon, qui, aux premières impressions de la passion ou du malheur, coururent chercher un asile dans la sainte solitude.

Parmi ces nobles pénitentes, comment ne pas distinguer une amie particulière de Mme de Longueville, dont le rang était presque égal au sien, qui était comme elle sensible et fière, et qui, frappée de bonne heure dans ses affections, se retira du monde avant elle, et n’entendit le bruit de la Fronde qu’à travers les murs du couvent de la rue Saint-Jacques, où depuis plusieurs années elle avait fui la menace d’un trône et les périls de son propre cour ? Cette amie, à laquelle Mme de Longueville a écrit bien des lettres, est la sœur Anne-Marie de Jésus, c’est-à-dire Anne-Louise-Christine de Foix de LaValette d’Épernon, cœur du duc de Candal.le, fille de Bernard, duc de La Valette d’Épernon, et de Gabrielle de Bourbon, fille légitimée de la duchesse de Verneuil et de Henri IV.

Nous avons une vie assez étendue de Mlle d’Épernon de la main de l’abbé de Montis[1] ; mais il faut se défier presque autant des vies édifiantes que des historiettes de Tallemant des Réaux. Celui-ci ne cherche que le scandale et ne voit partout que le mal. Les pieux panégyristes sont tout aussi crédules dans le bien. Évidemment l’abbé de Montis n’a pas tout su ou n’a pas voulu tout dire. Il n’a pas l’air d’avoir lu les mémoires de Mademoiselle ni ceux de Mme de Motteville. Il peint avec vérité la personne et le caractère de Mlle d’Épernon ; il se

  1. Paris, 1774, in-12.