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pays, suivant M. Bureau de Pusy, ne possède que pour 15 millions de menue monnaie. Les quatre cinquièmes de cette somme, représentés par des pièces de quatre pfennings en billon, valent intrinsèquement les sept huitièmes de leur valeur courante, de sorte qu’on atteindrait le pair en ajoutant au prix de la matière celui du monnayage. Il y a en outre pour 3 millions de simples pfennings en cuivre pur, dont la valeur métallique est moindre parce que les frais de la main-d’œuvre sont beaucoup plus multipliés. Voilà un système monétaire tout-à-fait à l’abri de la contrefaçon. Pour la Russie, ajoutait encore M. Bureau de Pusy, le tableau mentionne une pièce de faible poids, le kopeck de 6 gr. 85 centigr., émis au cours de 4 cent., fabriqué en 1810, pendant la détresse de l’empire ; mais cette espèce a été démonétisée en des jours meilleurs, et aujourd’hui le kopeck, pesant 10 gr. 23 centig. et valant 4 cent., présente une valeur intrinsèque excédant de 20 pour 100 celle de nos sous actuels, et qui dépasserait de 158 pour 100 celle des sous décimaux qu’il s’agit de fabriquer. Appelé à la tribune par l’émotion de la chambre, le rapporteur déclara que les observations de M. Bureau de Pusy étaient parfaitement justes, que l’inexactitude des renseignemens transmis à l’administration avait été reconnue, et que, pour cette raison, le gouvernement avait évité de reproduire en 1843 le tableau annexé au projet de loi de 1842.

Les rédacteurs du nouvel exposé des motifs ont-ils ignoré ces détails ? Il y a lieu de le craindre, puisque les évaluations monétaires qu’ils énoncent paraissent empruntées au tableau de 1842. Voilà donc une des plus importantes parties de leur argumentation qui s’écroule. Il est incontestable que l’Angleterre, l’Espagne, le Danemark, la Suède, la Belgique, les États-Unis d’Amérique, ont, pour leurs monnaies d’appoint, un système correspondant à celui qui est encore en vigueur chez nous. Si les rectifications proposées par M. Bureau de Pusy pour la Russie, la Prusse et l’Autriche, sont admises, il faudra reconnaître que la proportion d’environ 20 grammes au décime est une mesure métallique consacrée par une expérience à peu près générale, et qu’en réduisant brusquement cette mesure à moitié, la France va se mettre en désaccord avec presque tous les peuples.

On a beau dire que la monnaie d’appoint n’est qu’un signe, il n’en est pas moins vrai qu’on n’a jamais affaibli son poids au-dessous d’une certaine limite sans causer de grandes perturbations. Citons quelques exemples.

Le monnayage du cuivre tient une place importante dans l’histoire de Russie. Au sortir de cet âge barbare où les Russes se transmettaient des petits morceaux de cuir timbrés, remboursables en peaux et en fourrures, le tsar Alexis eut la fantaisie de décréter que le cuivre aurait à l’avenir la même valeur que l’argent. Depuis 1653, date du