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par la Prudence et la Valeur, et suivi d’une Victoire ailée qui, de la main droite, place une couronne sur la tête du héros, et de la gauche porte l’Apollon du Belvédère avec cette légende : La science et les arts reconnaissans, paix signée en l’an VI. Deux médailles caractéristiques, les dernières de l’époque révolutionnaire, indiquent nettement la transition entre le régime démocratique et un nouvel ordre de choses. Sur la première, qui représente le Retour d’Égypte et l’Arrivée à Fréjus, l’artiste a figuré d’un côté deux frégates voguant à pleines voiles, et de l’autre le dieu Bonus Eventus, représenté comme sur les monnaies romaines. La seconde est la médaille du 18 brumaire.

Les médailles napoléoniennes dont les coins sont conservés à la Monnaie de Paris sont au nombre d’environ deux cents. Nous avons fait connaître celles qui précèdent le consulat : une seule pièce assez faible représente Bonaparte premier consul ; on lit au revers et au centre d’une couronne de lauriers : Il affermit par ses victoires, honore par ses vertus, fait aimer par sa modération la république et la liberté. Il parait qu’au moment où cette médaille fut frappée, les idées à la Washington dominaient encore ; mais voici déjà le passage du mont Saint-Bernard. D’un côté, la Victoire nous apparaît debout sur un canon placé sur une espèce de traîneau auquel des chevaux qu’elle dirige font gravir le sommet d’une montagne escarpée ; de l’autre côté, onze clés, faisant allusion au même nombre de villes qui ouvrirent leurs portes le lendemain de la bataille de Marengo, sont suspendues à un anneau. Cette médaille du Saint-Bernard a été exécutée par Dubois, sous la direction de Denon. La Bataille de Marengo, la Mort de Desaix, l’Attentat du 3 nivôse, la Paix de Lunéville, la Paix d’Amiens, l’Arrivée de la Vénus de Médicis, l’Ouverture du Musée Napoléon, la Création de l’ordre de la Légion-d’Honneur, en un mot tous ces incidens fameux d’une heureuse et brillante époque sont rappelés par une suite de médailles fort remarquables pour la plupart. Napoléon nous apparaît pour la première fois en empereur sur les médailles du Camp de Boulogne. Bientôt nous assistons à son couronnement, puis au sacre, et toute l’ère impériale se déroule devant nous. Il faut en convenir, jamais la numismatique n’a eu à consacrer de plus glorieux et de plus mémorables événemens, et si l’art ne se maintient pas toujours à leur hauteur, du moins témoigne-t-il des plus louables efforts. La plupart de ces médailles sont exécutées, sous la direction de M. Denon, par Duvivier, Andrieu, Gatteaux père, Brennet, Dupré. Leur manière se ressent du retour absolu de l’école française aux traditions antiques. L’art n’a peut-être plus ni la même ampleur ni la même liberté que sous Louis XIV et Louis XV : il a fait divorce avec la peinture et s’inspire exclusivement de la statuaire et du bas-relief ; mais cette rigueur et ce parti pris nous paraissent tout-à-fait convenir à ce genre de composition. Peut-être seulement recommence-t-on à abuser, comme sous Louis XIV et Louis XV, des allégories et emblèmes mythologiques et à se modeler trop uniformément sur les chefs-d’œuvre de l’antiquité. Le mode d’interprétation n’est plus le même qu’autrefois ; il est moins fleuri, plus capricieux, et se rapproche beaucoup plus de la vérité. La physionomie napoléonienne est d’ailleurs bien plus dans les données antiques que, celle des rois Louis XIV et Louis XV. Toutefois on nous représente trop souvent l’homme illustre en empereur romain, en Hercule, en Mars, en Fabius, etc. Souvent aussi l’imitation de l’antique est trop littérale, quelquefois même on se