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CHRONIQUE DE LA QUINZAINE.


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14 avril 1852.

Ce n’est point chose facile et qui se réalise par une subite illumination que la mise en œuvre complète et régulière de tout un ensemble d’institutions politiques. N’est-il pas nécessaire que toutes ces pièces d’un même mécanisme s’agencent, se combinent, pour fonctionner avec fruit ? Ne faut-il pas se reconnaître, savoir sur quel sol on marche, sonder l’inconnu ? Les transformations auxquelles on peut le moins disputer le succès, et qui changent le plus victorieusement les conditions politiques d’un pays, ne s’acclimatent pas dans le monde réel au premier commandement. Il y a souvent les retardataires en compensation de ceux qui entrent très vite dans l’esprit des organisations nouvelles, et qui s’y comportent avec un aplomb de vieux soldats, comme s’ils y eussent toujours vécu. Ce n’est pas trop d’un peu de temps pour marquer ces transitions, pour jeter quelque jour dans ces confusions qui naissent du mélange incohérent de préoccupations persistantes d’autrefois, d’habitudes anciennes et de conditions nouvelles. C’est là une des difficultés inhérentes à l’origine des régimes nouveaux, et c’est là ce qui explique le mieux peut-être les tâtonnemens du corps législatif à son début. Le corps législatif a peu fait encore, sans doute parce qu’il avait peu à faire, et aussi parce qu’il lui restait à se demander quel personnage il représentait dans l’état. La suspension de ses séances pendant la semaine sainte est venue à propos couvrir cette pénurie de travail ou ces hésitations. La semaine sainte est par elle-même un temps peu politique, à vrai dire. Si le plus grand spectacle est celui d’un peuple religieux observant les rites de sa croyance, pourquoi ne passerait-il pas quelque chose de l’impression universelle dans la pratique des pouvoirs publics, ou du moins dans le silence de leurs travaux ? En Angleterre, le parlement, qui se connaît en liberté, n’interrompt-il pas sa session à la Noël, à l’époque des principales fêtes chrétiennes ? Un des plus curieux effets de cette révolution de février, qui a été la source de tant d’étonnemens, qui a engendré tant de résultats auxquels elle s’attendait si peu, et qui étaient dans la logique de ses origines